Urgence Océans : Le sommet de Tanger fixe la feuille de route 2030
Déclaration de Tanger : l'Afrique exige un "Hub Bleu" pour financer sa transition maritime et mise sur le #PrivateEquity et les crédits carbone pour sortir de l’endettement.
LA VÉRITÉ
Les océans africains sont au cœur d’une transformation économique et environnementale majeure. C’est dans cette perspective stratégique que s’est tenue la 3e édition du Blue Africa Summit, à Tanger, les 9 et 10 octobre 2025. Organisé sous le Haut Patronage de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, à l’initiative de l’Académie du Royaume du Maroc et de la Saison Bleue, cet événement a réuni plus de 100 participants représentant près de 30 pays. Il a constitué une plateforme privilégiée pour les décideurs publics et les acteurs de l’écosystème. Leur objectif principal était de réaffirmer la nécessité d’avancer conjointement vers une économie bleue régénérative et la résilience de l’océan. En conclusion de ces travaux, les participants ont adopté la Déclaration de Tanger, un document qui trace une feuille de route ambitieuse pour l’avenir maritime du continent.
Pour un hub africain-européen pour l’investissement
La Déclaration de Tanger a mis l’accent sur la nécessité d’accélérer l’industrialisation bleue du continent. Par conséquent, elle appelle explicitement à la mise en place d’un « Hub africain-européen pour l’innovation et le financement ». Ce dispositif est crucial. En effet, il est destiné à soutenir l’industrialisation bleue et à favoriser la mobilisation de financements et d’outils d’investissements au service du continent africain.
De plus, la Déclaration souligne l’importance d’une coopération étroite avec les autres espaces continentaux. Notamment, l’Union européenne est considérée comme un partenaire clé, car elle a déjà développé des mécanismes politiques de partenariat et de financement entre les deux continents.
Financements innovants face à l’endettement
Le contexte financier actuel est marqué par une baisse de l’aide au développement, ainsi que par une montée des niveaux d’endettement des États africains. C’est pourquoi la Déclaration a insisté sur la mise en place d’outils de financement innovants. Elle plaide pour un recours accru au secteur privé. Par exemple, elle suggère de mobiliser le private equity.
En outre, les participants ont identifié d’autres sources de capitaux essentielles. Ils appellent à la mobilisation de l’épargne de la diaspora et au développement de crédits carbone bleus crédibles. L’objectif est de trouver des solutions durables et autonomes pour financer la transition bleue de l’Afrique.
Le défi de la protection marine et du changement climatique
Face aux effets du changement climatique, à la perte de la biodiversité et à la pollution des océans, la Déclaration a souligné l’urgence d’agir à tous les niveaux. Ces phénomènes affectent directement les populations locales, les écosystèmes et les chaînes de valeur mondiales.
Aussi, les participants ont réaffirmé l’importance de l’Accord de Kunming-Montréal, dont l’objectif est d’atteindre 30% d’Aires marines protégées (AMP) d’ici 2030. La Déclaration signale que les réalisations restent encore en deçà des objectifs fixés. Dès lors, elle souligne la nécessité d’accélérer la création de nouvelles AMP. Par conséquent, il est prévu qu’un réseau africain-méditerranéen-européen de zones marines protégées soit mis en place. Ce réseau permettra de renforcer les échanges de capacités et de promouvoir une action transcontinentale coordonnée.
De même, la Déclaration a appelé à la promotion de techniques de pêche durables. Ces techniques devraient être fondées sur l’artisanat local, afin de concilier les objectifs de sécurité alimentaire avec une gestion responsable des ressources halieutiques.
Vers une gouvernance océanique responsable
La Déclaration a mis en lumière l’importance cruciale de la gouvernance internationale. Elle appelle à la reconnaissance des initiatives multilatérales et juridiques récemment entrées en vigueur. En outre, elle exhorte à des ratifications rapides. Il s’agit notamment de l’Accord sur la diversité biologique marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale (dit BBNJ).
Également, la ratification de l’Accord Fish-1 de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), relatif à l’interdiction des subventions à la pêche illicite, non déclarée et non réglementée, est jugée essentielle. La Déclaration a d’ailleurs salué le rôle majeur de la coalition, rejointe par 40 pays, qui appelle à une « pause de précaution concernant l’exploitation des grands fonds marins ».
Ainsi, les États africains ont été invités à rejoindre le groupe des Ocean Pioneers, qui regroupe actuellement 25 pays. Ce groupe marque un engagement fort en faveur d’une gouvernance océanique responsable, car ses membres ont à la fois ratifié le traité BBNJ et adhéré à la coalition sur l’exploitation des grands fonds marins.
Science, inclusion et futurs travaux
Pour faire face aux défis maritimes, l’innovation et l’inclusion sont primordiales. Les participants ont mis en avant la nécessité de développer des agences scientifiques collaboratives pour soutenir la recherche fondamentale et appliquée. De plus, il faut identifier des pôles d’excellence scientifique et économique. Ces pôles devront proposer des solutions innovantes et décarbonées.
Sur le plan social, la Déclaration a souligné la nécessité d’instaurer une véritable parité. Cela concerne particulièrement les postes exécutifs des organisations maritimes africaines. Enfin, elle a reconnu le rôle central de la jeunesse africaine dans cette dynamique.
Le pacte pour une Afrique bleue durable
La Déclaration de Tanger synthétise un engagement continental fort en faveur de la durabilité, de l’innovation financière et de la coopération transcontinentale. L’événement de deux jours a marqué le lancement officiel des travaux de réflexion et de rédaction du premier « Pacte pour une Afrique bleue durable ». Quatre collèges thématiques sont chargés de cette préparation : « Gouvernance, territoires et sécurité maritime, » « Sciences et éducation, » « Économie et finance bleues, » et « Société civile ». Ces groupes de travail poursuivront leurs concertations au cours du premier semestre 2026.
Finalement, ce Pacte sera présenté officiellement lors de la 4ᵉ édition du Blue Africa Summit, programmée à l’automne 2026. En attendant, la Déclaration a appelé les pays africains à s’engager au plus haut niveau politique pour la première COP de la Haute Mer (COP1), prévue au second semestre 2026 au siège des Nations Unies à New York. L’Afrique parviendra-t-elle à concrétiser ces ambitions et à mettre en œuvre les politiques d’adaptation nécessaires pour protéger ses écosystèmes littoraux et ses stocks halieutiques des impacts dévastateurs de la pollution et du recul du trait de côte ?
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