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Une norme inédite pour encadrer les produits sans fumée dès février 2026

LA VÉRITÉ


À partir de février 2026, le Maroc franchira une étape décisive dans la régulation des produits à base de nicotine. L’Institut Marocain de Normalisation (IMANOR) rendra obligatoire une nouvelle norme nationale qui encadrera pour la première fois les cigarettes électroniques, le tabac chauffé et les sachets de nicotine. Cette mesure inédite place le Royaume parmi les premiers pays africains à instaurer un cadre technique précis pour ces produits en pleine expansion, longtemps restés à la marge du contrôle sanitaire et commercial.

Cette décision intervient dans un contexte où les alternatives au tabac classique connaissent une croissance rapide au Maroc. Les produits dits « sans fumée » séduisent de plus en plus de consommateurs, notamment parmi les jeunes, attirés par l’image de modernité et la promesse d’un risque réduit. Pourtant, jusqu’ici, leur commercialisation échappait à tout contrôle structuré. La norme désormais imposée par l’IMANOR entend corriger cette zone grise en définissant des règles claires en matière de composition, d’étiquetage, de sécurité et de traçabilité. Tous les produits importés devront, dès 2026, se conformer à ces exigences sous peine de retrait du marché.

Les autorités estiment qu’il était urgent de combler ce vide réglementaire, d’une part pour protéger les consommateurs face à des produits souvent mal identifiés et parfois contrefaits, d’autre part pour aligner la législation nationale sur les standards internationaux. Le Maroc ne produit pas encore localement ce type de dispositifs, ce qui rend d’autant plus cruciale la mise en place de mécanismes de contrôle aux frontières et dans les circuits de distribution. L’obligation d’un étiquetage complet mentionnant le fabricant, la composition, la provenance et la date de production constitue une avancée majeure pour la transparence du marché et la santé publique.

Cette norme s’inscrit dans une logique plus large de régulation du tabac. Depuis la réforme de la loi 66-20, qui a intégré le tabac chauffé dans la législation sur le tabac, les autorités marocaines multiplient les initiatives pour encadrer les nouveaux modes de consommation de nicotine. En janvier 2025, une taxe spécifique de 50 dirhams sur les cigarettes électroniques jetables avait déjà été instaurée. Le cadre normatif à venir vient ainsi compléter l’arsenal fiscal et juridique mis en place pour mieux structurer un marché jusque-là éclaté.

Pour les associations de consommateurs, cette norme représente un pas dans la bonne direction, même si des défis subsistent. Ouadi Madih, président de la Fédération Nationale des Associations de Consommateurs, estime que la protection passe avant tout par la traçabilité et la bonne information. Selon lui, il ne s’agit pas d’interdire ces produits mais d’offrir aux utilisateurs une garantie minimale de qualité et de sécurité. Encore faudra-t-il que le consommateur comprenne la portée de ces mentions et que les autorités accompagnent la réforme par des campagnes d’information et de sensibilisation.

L’autre enjeu majeur sera celui du contrôle effectif. Le marché marocain du tabac et de ses dérivés reste traversé par un réseau informel puissant, capable d’écouler des produits non conformes à des prix attractifs. Les services de douane et les laboratoires de certification devront donc être dotés de moyens suffisants pour vérifier la conformité des importations et sanctionner les manquements. Sans cet effort de surveillance, la norme risquerait de rester un cadre théorique.

Reste aussi à clarifier la place que le Maroc souhaite donner à ces produits dits « à risque réduit ». Certains pays les considèrent comme des outils de sevrage potentiels, d’autres comme de nouvelles menaces pour la santé publique. Le Royaume semble pour l’heure privilégier une approche pragmatique, encadrer sans encourager, réguler sans promouvoir. En cela, cette norme obligatoire marque un équilibre entre la liberté de consommation et la responsabilité publique.

L’impact sur les prix pourrait également être notable. Les importateurs devront adapter leurs emballages, certifier leurs produits et assumer les coûts de conformité. Ces ajustements pourraient se répercuter sur le consommateur final, mais ils devraient aussi contribuer à assainir la concurrence en éliminant les produits de contrefaçon ou d’origine douteuse.

En instaurant cette norme, le Maroc envoie un signal fort. Il s’agit d’une affirmation de souveraineté réglementaire dans un secteur dominé par les multinationales du tabac et de la nicotine, mais aussi d’un acte de protection des citoyens face à des produits nouveaux dont les effets restent mal connus. Ce pas n’est pas anodin puisqu’il traduit une volonté de maîtriser les transformations d’un marché mondial en mutation tout en affirmant le rôle de l’État comme garant de la santé publique et de la transparence économique.

Février 2026 ne sera pas seulement une date administrative, mais le point de départ d’un nouveau cadre de confiance entre l’État, le consommateur et les opérateurs économiques. Une norme qui, si elle est bien appliquée, pourrait servir de référence régionale et replacer le Maroc à l’avant-garde des politiques publiques en matière de réduction des risques et de régulation des nouveaux produits nicotiniques.


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