Rentrée parlementaire 2025 : Le Royaume à l’heure des équilibres
Par Sanae El Amrani
Le Maroc entre dans une rentrée parlementaire décisive. Après des années consacrées aux grands chantiers d’infrastructures et à la transformation du territoire, l’heure est à l’équilibre : celui qui replace la santé, l’éducation et la justice sociale au cœur du projet national. Sous l’autorité du Souverain, le pays s’interroge sur ses priorités, redéfinit ses urgences et cherche à concilier ambition et équité. Car la force d’un Royaume ne se mesure plus à ses ouvrages d’ingénierie, mais à la solidité de son lien social, à la confiance de sa jeunesse et à la qualité de vie de ses citoyens.
L’automne institutionnel s’ouvre sur un moment de lucidité nationale. Le Maroc, fort de ses réussites économiques et de son rayonnement international, prend conscience que la prochaine étape de son développement ne se jouera plus dans le béton, mais dans l’humain. Les chantiers portuaires, énergétiques et logistiques ont redessiné la carte du Royaume ; il reste à rebâtir la cohésion et la confiance, dans un pays qui aspire désormais à un modèle plus équilibré, plus juste et plus proche de ses citoyens.
La rentrée parlementaire 2025 s’inscrit dans cette transition. Après plusieurs semaines de tension sociale, la société a exprimé un besoin profond de justice, de transparence et de reconnaissance. Le Souverain, garant de la stabilité et de la cohésion nationale, s’apprête à fixer les orientations d’une nouvelle phase, centrée sur la réforme sociale et la responsabilité institutionnelle. Le pays ne cherche plus à construire seulement des infrastructures, mais à consolider un socle humain, celui de la dignité, de l’éducation, de la santé et de l’emploi.
Dans cette perspective, la session parlementaire d’octobre n’est pas une formalité politique. Elle représente une étape où le dialogue entre la parole royale, le gouvernement et la représentation nationale doit trouver un nouvel équilibre. C’est le moment où le Maroc réaffirme, face à lui-même, que le progrès ne peut se résumer à la croissance, mais à la capacité collective d’assurer à chaque citoyen sa place dans le projet national.
Un climat social sous pression, une attente nationale en suspens
Le Maroc vit une séquence inédite où la rentrée parlementaire dépasse sa portée protocolaire. Elle s’ouvre dans une atmosphère d’attention et de tension mêlées, portée par une jeunesse qui a exprimé sa lassitude avec dignité et détermination. Les manifestations pacifiques menées ces dernières semaines ont agi comme un miroir social : elles ont révélé la maturité d’un pays qui sait protester sans se fracturer, questionner sans remettre en cause ses fondements.

Née d’une indignation face aux défaillances du système de santé, la mobilisation de la Génération Z s’est rapidement élargie à des thèmes plus profonds : la qualité de l’école, l’accès à l’emploi, la confiance dans les institutions. Cette génération, à la fois connectée, instruite et exigeante, ne revendique pas le désordre mais le droit à l’efficacité et à la considération. Elle veut un État moderne, à l’écoute, capable d’agir vite et de rendre des comptes.
Le gouvernement, lui, a mis du temps à trouver le ton juste. Son silence initial a été perçu comme un flottement, alors même que le pays cherchait des réponses claires et une parole d’apaisement. Ce décalage a coûté en perception publique, rappelant à quel point, en politique, le silence se paie toujours cher. Mais une fois la parole reprise, le ton a changé : les autorités ont privilégié l’écoute et la retenue, cherchant à comprendre avant de réagir. L’exécutif a ensuite multiplié les signaux d’ouverture, les annonces sectorielles et les promesses de réformes accélérées, notamment dans la santé et l’emploi. Cette réactivité tardive mais réelle a marqué un tournant dans la gestion de la crise et préparé le terrain pour un nouveau dialogue social.
Cette rentrée parlementaire s’ouvre donc sur un équilibre sensible : celui d’un pays conscient de ses tensions mais confiant dans sa stabilité. Le Maroc avance avec sérénité parce qu’il a su, une fois encore, contenir la colère par la responsabilité et replacer la confiance royale au centre du pacte national. Les institutions tiennent, la rue s’exprime, la société débat : autant de signes d’une vitalité politique assumée et d’une maturité collective.
L’attente est désormais tournée vers la parole du Souverain, appelée à donner sens et direction à ce moment suspendu. La nation espère une orientation claire : celle d’un Maroc qui assume sa maturité politique et transforme les tensions en moteur de réforme. Car au-delà du tumulte, c’est une conscience collective qui émerge : celle d’un pays qui refuse la rupture et choisit, encore une fois, l’équilibre.
Le Parlement face à l’exigence de résultats
Une rentrée sous pression politique et sociale
La rentrée parlementaire 2025 s’ouvre sur fond de tensions sociales, d’exigence de transparence et de volonté d’efficacité. Dans un pays où le débat public s’est déplacé vers la rue et les réseaux, le Parlement retrouve un rôle central, celui de transformer le tumulte social en action législative. Cette session d’automne, la première après une séquence de contestation inédite, met à l’épreuve la solidité des institutions et leur capacité à traduire les attentes citoyennes dans le langage du droit et de la réforme.

Le Souverain a, à plusieurs reprises, rappelé que la crédibilité des institutions ne se mesure pas à la solennité des discours, mais à la portée des actes. Ce principe s’impose aujourd’hui au Parlement, dans un contexte où chaque mot du discours royal sera attendu comme une orientation à concrétiser. Les parlementaires, qu’ils appartiennent à la majorité ou à l’opposition, sont désormais sommés de sortir des postures pour entrer dans une logique de résultats. Le débat parlementaire ne peut plus se contenter d’être un espace de confrontation rhétorique ; il doit devenir une instance de suivi, de responsabilité et d’évaluation publique.
Les observateurs notent d’ailleurs que cette session s’ouvre avec une opinion publique plus informée, plus critique et plus exigeante que jamais. Le mouvement des jeunes, bien qu’apaisé, a changé la perception du pouvoir politique : il a imposé un regard neuf sur la question de la reddition des comptes. L’époque où la lenteur administrative pouvait se justifier par la complexité des réformes semble révolue. Le Maroc de 2025 est un pays qui demande des résultats visibles, mesurables et équitables. Et c’est désormais au Parlement de devenir le relais de cette exigence nationale.
La loi de finances 2026, test de crédibilité
Le premier grand rendez-vous de cette session sera celui du Projet de Loi de Finances 2026, véritable thermomètre politique de la rentrée. Après un exercice 2025 marqué par la stabilisation macroéconomique et un effort budgétaire considérable pour soutenir le pouvoir d’achat, le gouvernement devra désormais convaincre qu’il peut conjuguer rigueur et équité. La croissance, estimée autour de 3,6 % par Bank Al-Maghrib, reste portée par l’agriculture et les exportations industrielles, mais la création d’emplois demeure inégale. L’inflation, redescendue sous les 2,5 %, a offert un répit aux ménages, sans effacer la tension persistante sur les prix des produits de base et des loyers urbains.
La Loi de Finances 2026 sera donc un test de cohérence : peut-on maintenir la trajectoire de désendettement tout en renforçant la dépense sociale ? Le débat ne sera pas seulement technique, mais éminemment politique, car il s’agit de savoir comment traduire dans les chiffres la promesse d’un Maroc plus équilibré. Le ministère des Finances devra arbitrer entre les impératifs de soutenabilité budgétaire et la pression sociale qui exige davantage de moyens pour la santé, l’école publique, la protection sociale et l’emploi des jeunes.
Selon la Direction des Études et des Prévisions Financières, près de 65 % du budget d’investissement public restera orienté vers les infrastructures stratégiques et l’énergie. Or cette orientation, jugée nécessaire pour la compétitivité, interroge la hiérarchie des priorités dans un contexte où l’opinion attend un rééquilibrage vers les politiques sociales. Le gouvernement mise sur la poursuite de la réforme de la fiscalité et sur l’élargissement de l’assiette contributive pour financer ces programmes sans aggraver le déficit, prévu à 4,2 % du PIB.
Mais derrière ces chiffres, c’est bien la crédibilité politique qui se joue. Le Parlement devra démontrer qu’il n’est pas un simple lieu d’enregistrement des choix gouvernementaux, mais une instance de débat capable d’imposer des corrections, de défendre la transparence et de rendre compte à la population. Car le Maroc de 2025 n’attend plus seulement des promesses, mais des chiffres qui parlent et des réformes qui s’appliquent.
Les réformes sociales : protection, santé, éducation
Derrière la tension politique et les chiffres budgétaires, c’est la réalité sociale qui s’impose comme la priorité absolue. Le Maroc entre dans une phase déterminante de ses réformes structurelles, et le Parlement est appelé à en garantir la continuité, la cohérence et la transparence. Trois chantiers dominent cette séquence : la protection sociale, la santé et l’éducation, les trois piliers du nouveau contrat social voulu par le Roi.
La généralisation de la protection sociale, initiée dès 2021, est désormais entrée dans sa phase de consolidation. Plus de 23 millions de Marocains bénéficient aujourd’hui de l’Assurance Maladie Obligatoire (AMO), selon la CNSS, et la réforme du Registre Social Unifié (RSU) avance, bien qu’irrégulièrement, dans certaines régions rurales. Cette base de données, essentielle pour cibler les aides directes, constitue le cœur du nouveau système d’équité nationale. Le Parlement devra suivre de près la mise en œuvre de ces dispositifs, afin qu’ils ne se limitent pas à une annonce institutionnelle mais deviennent un levier réel de justice sociale.
Le secteur de la santé, lui, reste le plus sous tension. Le ministre Amine Tahraoui a reconnu, dans sa dernière intervention, la gravité de la situation et annoncé une réorganisation complète de la carte sanitaire, un renforcement du budget hospitalier et un effort particulier sur les ressources humaines. Mais les attentes sont immenses. Les Marocains ne jugeront pas cette réforme à ses intentions, mais à la qualité du service rendu : des hôpitaux mieux équipés, des délais réduits, un personnel motivé et formé. Le Parlement aura donc à jouer un rôle de contrôle décisif sur la répartition des crédits et l’application effective des plans régionaux.
Quant à l’école, elle demeure au centre du débat national. Le ministère de l’Éducation s’est engagé à mettre en œuvre le Plan d’Accélération de la Transformation de l’Éducation 2025-2027, qui doit revoir la formation des enseignants, réformer les curricula et revaloriser les établissements publics. L’objectif est de restaurer la confiance dans l’école publique, aujourd’hui fragilisée. Mais cette réforme exige un accompagnement législatif et budgétaire, sans quoi elle restera un slogan technocratique.
Le Parlement se trouve désormais face à une responsabilité claire : assurer la cohérence de ces réformes et veiller à leur concrétisation. Les citoyens ne demandent plus des discours d’intention, mais des signes concrets d’amélioration dans leur vie quotidienne. C’est sur cette exigence que se mesurera la crédibilité du pouvoir politique dans les mois à venir.
Le contrôle de l’action gouvernementale
Le débat parlementaire ne se limite plus à l’élaboration des lois : il devient le véritable baromètre de la crédibilité de l’action publique. Après plusieurs législatures marquées par une faible culture de l’évaluation, le Maroc entre dans une période où le contrôle parlementaire prend une dimension décisive. L’opinion ne se satisfait plus des annonces, elle veut savoir comment les politiques sont appliquées, quelles sont leurs limites, et à qui incombe la responsabilité lorsqu’elles échouent.
Le contrôle de l’action gouvernementale s’impose donc comme un enjeu central de cette session. L’article 101 de la Constitution, souvent cité mais rarement incarné, confie aux deux Chambres le pouvoir d’évaluer les politiques publiques. Jusqu’ici, cet exercice est resté formel, souvent cantonné à des rapports peu suivis d’effet. Désormais, la conjoncture impose un tournant : chaque réforme doit être mesurée à son impact réel sur les citoyens. Les commissions parlementaires permanentes sont appelées à devenir des lieux d’expertise et non de posture politique.
Plusieurs institutions d’appui, comme la Cour des comptes, le CESE ou le HCP, disposent déjà des instruments nécessaires pour accompagner ce mouvement. Ce qu’il manque encore, c’est une culture partagée de la responsabilité. Les parlementaires doivent s’approprier les outils d’analyse économique et sociale pour sortir du simple commentaire politique. Dans cette optique, la collaboration entre le Parlement et les organismes indépendants pourrait constituer un levier essentiel pour asseoir une gouvernance fondée sur la preuve et l’évaluation.
Le contrôle ne doit plus être perçu comme une confrontation entre majorité et opposition, mais comme un devoir commun envers la société. Dans un pays où le Roi fixe les grandes orientations et où le gouvernement les met en œuvre, le Parlement reste le garant de la cohérence et de la transparence. Son rôle n’est pas de freiner, mais de vérifier ; non de s’opposer pour s’opposer, mais d’assurer que chaque dirham public serve un objectif clair.
La qualité du débat, la rigueur des chiffres et la clarté des bilans sont désormais les vraies mesures du sérieux politique. Si le Maroc veut renforcer la confiance dans ses institutions, c’est au Parlement de donner le ton, en s’imposant comme un espace de reddition des comptes et de résultats tangibles.
Crédibilité institutionnelle et lien Parlement–société: où en est-on, chiffres en main
La session qui s’ouvre est jugée à l’aune d’un pays informé et exigeant. Les mobilisations « GenZ212 » ont remis au centre du jeu la qualité des services publics et l’arbitrage entre prestige d’investissement et urgences sociales. À la veille du discours royal, la presse internationale notait encore des rassemblements le 9 octobre et l’attente d’un cap politique clair. Ce contexte rend le travail parlementaire immédiatement lisible pour le public.
Côté emploi, les derniers chiffres du HCP établissent le chômage national à 12,8% au deuxième trimestre 2025, avec une tension aiguë chez les 15–24 ans à 35,8%. Le volume de chômeurs recule de 38 000 personnes sur un an, mais l’urbanité et la jeunesse restent les zones de fragilité, ce qui impose des choix budgétaires visibles sur l’employabilité et la formation courte. Ces données donnent un étalon vérifiable pour suivre l’effet réel des amendements parlementaires sur le PLF 2026.
Sur les prix, la fenêtre d’action existe. Bank Al-Maghrib anticipe une inflation très basse autour de 1–1,1% en 2025, puis un retour proche de 2% en 2026. Autrement dit, l’argument de la « contrainte inflationniste » ne peut plus masquer les retards d’exécution. Le Parlement a la main pour orienter le budget vers les priorités sociales sans nourrir une poussée des prix.
La protection sociale change d’échelle. Selon la CNSS et la communication gouvernementale de septembre, plus de 15 millions de nouveaux affiliés ont été intégrés à l’AMO depuis 2021, portant la couverture médicale au-delà de 80% de la population. Le dispositif AMO-Tadamon couvre environ 11 millions de personnes, soit près de 4 millions de familles. Le Parlement peut exiger des tableaux de bord régionaux sur les délais de remboursement, la disponibilité des plateaux techniques et la dotation en personnels, afin d’arrimer ces avancées à une expérience patient tangible.
Le rapport au temps politique est, lui aussi, objectivé. L’ouverture de la session d’automne a lieu ce vendredi 10 octobre, sous la présidence du Roi, avec un discours retransmis en direct en fin d’après-midi. Ce repère horaire fixe un rythme clair pour l’agenda législatif et pour la communication publique qui suivra. La crédibilité se jouera dans l’alignement entre ce cap et les premières délibérations en commissions.
Enfin, l’opinion mesure la hiérarchie des priorités. Les dépêches et analyses de la semaine montrent que la contestation vise moins la croissance que son affectation. Le débat porte sur l’équilibre entre chantiers d’infrastructures et services essentiels, notamment santé et éducation. C’est exactement le terrain de contrôle du Parlement : vérifier que les crédits 2026 reflètent une priorité claire pour l’hôpital public, l’école et l’emploi des jeunes, et que les ministères livrent des bilans trimestriels publics.
Aziz Akhannouch face à la fracture politique et sociale
Aziz Akhannouch aborde la dernière ligne droite de son mandat à la tête du gouvernement dans un contexte d’exigence inédite. L’homme d’affaires devenu chef de l’exécutif n’a jamais prétendu être un tribun : il se voulait gestionnaire, bâtisseur, héritier du pragmatisme économique qui a accompagné la modernisation du Royaume. Mais la conjoncture de 2025 met cette approche à l’épreuve. La période des grands chantiers structurels touche à sa fin, et l’heure est désormais au bilan : celui d’un Maroc qui cherche à traduire ses réussites macroéconomiques en progrès social tangible.

Lorsqu’il a été nommé en 2021, dans la foulée d’élections dominées par son parti, le Rassemblement National des Indépendants, Akhannouch avait promis une gouvernance axée sur l’efficacité et la continuité des projets royaux. Son programme reposait sur un triptyque : consolidation de la protection sociale, relance de l’emploi et soutien au pouvoir d’achat. Les premières années du mandat ont été marquées par la gestion post-Covid, la flambée des prix internationaux et l’inflation la plus forte qu’ait connue le pays depuis deux décennies. Sous la pression de ces crises, le gouvernement a dû naviguer entre rigueur budgétaire et maintien des équilibres, dans un contexte international instable.
Cette résilience s’est traduite par des chiffres solides : un déficit public revenu à 4,2 % du PIB, une dette stabilisée autour de 70 %, et un taux de croissance avoisinant 3,6 % en 2025 selon Bank Al-Maghrib. L’investissement public a atteint des sommets, porté par les chantiers d’infrastructure et d’énergie, tandis que le dirham a résisté aux tensions mondiales. Mais ces succès macroéconomiques peinent à convaincre une opinion devenue plus sensible à la qualité des services publics qu’aux équilibres financiers. L’inflation a ralenti sans pour autant effacer la perte de confiance accumulée, surtout dans les milieux urbains jeunes, confrontés à un chômage de 35 % chez les 15-24 ans.
Les manifestations de la Génération Z, qui ont traversé plusieurs villes, ont fait tomber l’illusion d’un consensus tranquille. Ce mouvement, pacifique mais déterminé, a révélé la fracture silencieuse entre une économie en expansion et une société qui ne se sent pas toujours bénéficiaire de cette croissance. Pour la première fois, la jeunesse a interpellé directement le pouvoir politique, exigeant des résultats concrets sur la santé, l’école et l’emploi. La réaction du gouvernement fut tardive mais décisive : le Chef du gouvernement a reconnu la légitimité des doléances, promettant une accélération des réformes sociales et un recentrage des politiques publiques sur les priorités du quotidien.
Cette séquence a marqué une inflexion dans la méthode Akhannouch. Son style, longtemps perçu comme technocratique et distant, s’est ouvert à une communication plus directe : dialogues régionaux, rencontres avec les acteurs économiques, et volonté d’ancrer la décision publique dans le terrain. La réforme du Registre Social Unifié, la consolidation du dispositif AMO-Tadamon et l’augmentation des aides aux ménages à faibles revenus sont devenues des marqueurs d’action. Le gouvernement a aussi misé sur l’emploi des jeunes à travers des programmes de formation accélérée et d’appui à l’entrepreneuriat, en partenariat avec les CRI et les chambres régionales.
Pour autant, les critiques demeurent. Dans un pays où la Monarchie incarne la cohérence et la continuité, l’exécutif est jugé sur sa capacité à exécuter rapidement les orientations royales. Le Souverain, dans son dernier discours d’ouverture du Parlement, a rappelé que la justice sociale et la cohésion territoriale ne sont pas des slogans, mais des exigences. Cet appel a agi comme un miroir pour la majorité : gouverner ne consiste pas à gérer l’équilibre budgétaire, mais à transformer la réalité quotidienne des citoyens.
Sur le terrain économique, Aziz Akhannouch peut revendiquer quelques réussites notables : le renforcement des exportations industrielles, la reprise des investissements directs étrangers, la stabilisation du prix des carburants et la maîtrise du déficit énergétique grâce à la diversification du mix national. L’agriculture, secteur qu’il connaît mieux que quiconque, a poursuivi sa modernisation dans le cadre du Plan Génération Verte, avec une attention accrue à la gestion de l’eau et à la valorisation de la production locale. Mais cette réussite agricole, concentrée sur certains bassins productifs, souligne aussi la fragilité d’autres régions laissées à l’écart du développement.
La question territoriale reste le défi le plus symbolique du mandat. Alors que les grands pôles urbains accumulent les infrastructures, les zones rurales attendent encore les routes, les hôpitaux et les écoles promis. C’est là que le discours royal prend toute sa portée : il invite à un nouveau pacte d’équité territoriale, que le gouvernement doit désormais incarner. L’efficacité publique n’est plus seulement une affaire de chiffres, mais une exigence morale.
En réalité, Aziz Akhannouch se trouve aujourd’hui dans la position la plus complexe de son parcours : celle d’un Premier ministre à la fois comptable de la stabilité et porteur de réformes profondes. Il doit rassurer les marchés, répondre aux attentes sociales, maintenir l’unité de sa majorité et prouver que la politique peut redevenir un espace de résultats tangibles. Son avenir politique, comme celui de son parti, dépendra moins de ses discours que de la perception que les Marocains auront, dans un an, de leur quotidien : une école plus fiable, un hôpital plus humain, une administration plus rapide.
À l’approche de la fin de la législature, la question n’est plus celle du pouvoir, mais de la crédibilité. Le Maroc avance, mais ses citoyens veulent sentir que ce mouvement leur appartient. C’est cette réconciliation entre efficacité gouvernementale et justice sociale qui déterminera, in fine, la trace du mandat Akhannouch. Le pays n’attend pas un changement de cap, mais une accélération dans la cohérence. L’histoire jugera moins le chef du gouvernement à la rigueur de ses budgets qu’à la clarté de sa vision et à la sincérité de son engagement au service du Royaume.
Le Roi recentre la gouvernance sur la justice territoriale et l’efficacité publique
Dans une conjoncture politique alourdie par les tensions sociales et la lassitude institutionnelle, le discours prononcé par Sa Majesté le Roi Mohammed VI à l’ouverture de la session parlementaire 2025 a réaffirmé la cohérence de la trajectoire nationale. En rappelant aux députés qu’ils entament la dernière année de leur mandat, le Souverain a replacé le sens du devoir, la rigueur et la responsabilité au cœur de l’action publique. Loin des calculs partisans, il a recentré le débat sur l’essentiel, la justice territoriale, l’efficacité économique et la continuité du modèle marocain de développement équilibré.

Ce discours, ferme et visionnaire, a d’abord sonné comme un rappel à l’ordre adressé à la classe politique. Le Roi a invité l’ensemble des acteurs, gouvernement, parlement, élus, partis, société civile et médias, à sortir du confort des déclarations pour renouer avec la culture du résultat. L’objectif n’est plus de commenter les réformes mais de les incarner. Dans une phase où le pays avance à grande vitesse sur ses chantiers d’infrastructure et de modernisation, l’enjeu n’est plus d’annoncer mais d’exécuter. Le Souverain a insisté sur la nécessité d’une cohérence entre les grands projets structurants et les programmes sociaux, en précisant qu’ils ne doivent jamais s’opposer, car ils forment les deux visages d’un même objectif, celui de l’amélioration durable des conditions de vie des citoyens.
Ce recentrage intervient à un moment crucial, où les voix de la jeunesse et des territoires marginalisés s’expriment avec force. Le Roi a rappelé que le Maroc ne peut réussir sa transition s’il laisse subsister des fractures géographiques ou sociales. La justice territoriale n’est plus un idéal, elle devient un impératif national. Le discours royal a ainsi fixé une feuille de route claire : encourager les initiatives locales, soutenir les économies régionales, créer des emplois pour les jeunes, renforcer les secteurs de la santé et de l’éducation et valoriser les territoires dans toutes leurs dimensions.
L’accent mis sur le développement des zones montagneuses et oasiennes illustre ce changement de paradigme. Ces régions, souvent laissées à la marge du développement, couvrent pourtant près d’un tiers du territoire national. Le Roi a appelé à l’élaboration d’une politique publique intégrée et adaptée à leurs réalités, fondée sur la solidarité interrégionale et la valorisation de leurs atouts naturels. De la même manière, le Souverain a insisté sur la gestion durable des côtes marocaines, en évoquant l’urgence d’appliquer pleinement la loi sur le littoral et le plan national de la côte, afin d’assurer un équilibre entre croissance économique et préservation de l’environnement. La mer, moteur du futur économique du Royaume, doit être un espace de richesse maîtrisée, non de spéculation.
Le discours a également mis en lumière l’importance d’un nouveau maillage territorial à travers l’essor des centres ruraux. Ces pôles intermédiaires, entre villages et villes, devront devenir des relais de services publics et des espaces de vie modernes, capables de retenir les jeunes et de réduire la pression urbaine. En cela, le Roi trace la voie d’une véritable refondation de la géographie sociale du Maroc, où chaque territoire devient acteur de son propre développement.
Mais au-delà des priorités territoriales, c’est le ton du Souverain qui a donné sa portée au message. La monarchie, garante de la continuité de l’État, fixe le cap du Maroc ascendant et solidaire : accélérer, responsabiliser, moderniser. Le Roi a rappelé que la justice sociale et la lutte contre les inégalités ne sont ni des slogans ni des promesses électorales, mais une orientation stratégique qui doit guider toutes les politiques publiques. Ce réalisme lucide replace la question de la performance au cœur du patriotisme institutionnel. L’efficacité n’est plus un critère administratif, elle devient une exigence morale et nationale.
Dans un contexte où les partis s’essoufflent et où la parole publique se délite, ce discours agit comme un recentrage salutaire. Il ne s’agit plus d’opposer la technique à la politique, mais de les réconcilier dans une même ambition : servir le citoyen. Le Roi invite à un changement de mentalité, à un usage intelligent des données, à une gouvernance fondée sur les résultats concrets et sur la transparence. C’est une leçon adressée à tous ceux qui, dans la sphère publique, ont oublié que l’action politique n’a de sens que si elle transforme la réalité.
En ouvrant la dernière session parlementaire de cette législature, le Souverain n’a pas seulement fixé des priorités, il a réaffirmé le rôle central de la monarchie comme garant de la cohérence nationale. L’appel royal à la responsabilité collective vient rappeler que le Maroc n’a pas besoin d’une alternance de discours, mais d’une continuité de résultats. Dans un pays où les défis territoriaux, sociaux et climatiques s’entrecroisent, ce discours marque un tournant : celui d’un État qui assume de mesurer son succès non à la grandeur de ses chantiers, mais à la justesse de ses équilibres.
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