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Quand l’économie exportatrice cherche un nouveau souffle

Par Fayçal El Amrani


Malgré la résilience de l’aéronautique et des phosphates, l’économie marocaine entame l’année 2025 sous tension. Le commerce extérieur affiche un déséquilibre marqué, confirmant les limites du modèle actuel d’exportation et la nécessité d’une diversification accrue.

Un déficit commercial qui s’aggrave

Selon les dernières statistiques de l’Office des Changes, à fin février 2025, le déficit commercial du Royaume a atteint 50,74 milliards de dirhams, en aggravation de 13,3 % par rapport à la même période de l’an dernier. Ce creusement est le résultat d’une progression des importations de 3,4 %, dépassant 59,8 milliards de dirhams, tandis que les exportations ont reculé de 2,4 % pour s’établir à 35,35 milliards. Le taux de couverture est ainsi tombé à 60,7 %, contre 63 % un an auparavant. Cette dégradation est attribuée au ralentissement de l’économie européenne, premier marché du Maroc, à la persistance des tensions géopolitiques, notamment en mer Rouge, et à la dépendance de l’industrie marocaine aux importations d’intrants.

Les secteurs exportateurs traditionnels sous pression

Les secteurs les plus exposés accusent le coup. L’automobile, premier poste d’exportation ces dernières années, enregistre un recul de 8,2 %. Le textile et cuir, malgré quelques signes de redynamisation en 2023, chute de 4 %, et l’agroalimentaire recule de 3 % malgré les efforts déployés dans certaines filières comme les fruits rouges. Les industries électriques et électroniques, quant à elles, subissent une contraction plus marquée de 15 %, révélant une dépendance critique aux importations de composants. Ces reculs s’ajoutent à un constat récurrent : l’intégration locale reste insuffisante et le positionnement du Maroc, en tant que base d’assemblage ou de sous-traitance, limite la création de valeur ajoutée.

Deux secteurs résistent : phosphates et aéronautique

Pourtant, deux secteurs continuent de tirer leur épingle du jeu. Les phosphates et dérivés enregistrent une progression de 13,1 %, portés par la demande mondiale et les efforts d’innovation de l’OCP, notamment en matière d’engrais adaptés aux besoins de l’Afrique et de l’Amérique latine. Le secteur aéronautique, quant à lui, maintient sa dynamique, avec une croissance de 14,9 %, soutenue par la diversification de ses clients et l’intégration de nouvelles capacités de production, comme les systèmes électriques et les pièces de précision. Ce succès repose sur une stratégie de montée en gamme amorcée avant la pandémie et renforcée par les récents investissements.

Des défis structurels toujours présents

Malgré ces quelques performances, les fondamentaux du commerce extérieur marocain demeurent fragiles. Environ 65 % des exportations marocaines restent orientées vers l’Union européenne, exposant directement l’économie nationale aux cycles conjoncturels de ce marché. Le poids de l’assemblage et de la sous-traitance dans l’industrie marocaine limite la création de valeur locale, rendant les exportateurs vulnérables à l’évolution des coûts logistiques et à la fluctuation des marchés d’approvisionnement. Les analyses de Bank Al-Maghrib et du ministère de l’Économie insistent également sur le faible niveau d’intégration industrielle, l’accès limité au financement et le manque d’innovation.

La Chine, un levier de diversification déjà actif

C’est dans ce contexte que le Maroc s’efforce d’ouvrir de nouveaux horizons commerciaux et industriels. La Chine apparaît aujourd’hui comme un partenaire stratégique, à la fois pour diversifier les débouchés et renforcer l’appareil productif local. Plusieurs projets concrets illustrent cette coopération. Le groupe chinois Sunrise a investi dans deux usines textiles à Fès et Skhirat, créant plusieurs milliers d’emplois. L’industriel Aeolon a lancé à Nador une unité de fabrication de pales éoliennes destinées aux marchés national et international, contribuant à l’essor de la filière des énergies renouvelables. Des réalisations emblématiques comme le pont Mohammed VI de Rabat rappellent l’ancienneté de ces partenariats.

Au-delà de ces succès déjà enregistrés, plusieurs chantiers sont en cours. La Cité Mohammed VI – Tanger Tech, projet phare du partenariat sino-marocain, entre progressivement en phase d’activation avec l’installation de premiers industriels. Parallèlement, un projet de gigafactory de batteries pour véhicules électriques est en développement à Kénitra, destiné à renforcer la filière automobile et à soutenir la transition vers la mobilité durable.

Ces initiatives, encore en construction, traduisent la volonté du Maroc de réduire progressivement sa dépendance vis-à-vis de l’Europe et de bâtir de nouvelles filières à forte valeur ajoutée, à condition de surmonter les défis liés à l’intégration industrielle et à la compétitivité logistique.


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