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Portrait d’artiste/Khadija Elfahli: Bestiaire humain

Abdelhak Najib


La peinture est une poésie qui se voit au lieu de se sentir et la poésie est une peinture qui se sent au lieu de se voir.
Léonard De Vinci

Cette vérité mise en lumière par l’un des grands esprits de la Renaissance trouve ici écho dans cette partie qui va au détail avec une précision d’orfèvre. Il y a dans cet univers une foultitude de vie. Cette déclinaison de l’énergie dans un espace ouvert sur l’humain octroie aux peintures de Khadija Elfahli une forme de domination de l’infiniment petit. Oui, la force du détail qui préside à l’élaboration de tout un bestiaire humain qui se déploie en toute liberté. Des silhouettes minuscules, des espaces immenses comme des agora, des situations de vie, des rencontres, des collisions…le tout avec minutie, rendant au plus près l’exactitude de ce qui est donné à voir. Chez Khadija Elfahli, la peinture est d’abord sentiment, puis sensation : «Je peins le miracle de la vie. Toutes ces scènes qui peuplent mes travaux rendent compte de la ferveur de la vie, de cette énergie vitale qui est un miracle. Et c’est ce miracle que je poursuis dans mes travaux depuis plusieurs décennies. J’ai tout mon temps, car le plus important est de faire cette quête, de vivre ce cheminement qui mène vers le grand ouvert… ». Peu importe le format peint, nous avons l’impression face aux peintures de Khadija Elfahli que c’est la constance de la lumière qui est recherchée. La peintre laisse son support ouvert sur l’infini. Et c’est cette ouverture qui garantit l’éclatement de cette œuvre si foisonnante. Une oeuvre qui va à la recherche du non-visible au coeur de ce qui semble visible, de premier abord. Une peinture qui va au-delà du sens premier que l’on perçoit en regardant ce qui est peint, entre silhouettes et formes ondulantes: “La peinture n’est autre qu’une idée des choses incorporelles.”, disait Nicolas Poussin. Il y a aussi le choix des couleurs. Toute une palette chromatique qui fait que visuellement, ce travail subjugue par son audace, sa puissance et cette maîtrise de la couleur dans sa relation avec les formes et les nuances. Khadija Elfahli avance pour paliers successifs qui versent dans le même sens : celui de donner un sens à cette frénésie de vie. «Encore une fois, quand je peins, mon souci premier est de trouver l’éclat, même quand j’utilise des couleurs sombres. Il suffit d’une pointe de blanc, d’un point jaune, d’une infime ligne de lumière et l’œuvre est transcendée en son éclat intrinsèque». Cet éclat est le gage d’une interaction alchimique entre l’humain qui occupe une grande place dans ce travail et l’espace couplé au temps qui est, dans un sens, sa demeure. Cette demeure est composée de visages, de corps, d’entrelacements, de sinuosités chromatiques qui prennent la forme d’un ensemble harmonieux, dans une richesse de couleurs qui dit tout le savoir-faire du peintre, qui joue avec les formes, triture les silhouettes et combine clair et obscur pour mieux laisser voir cette lumière originelle qui préside à tout ce qui est vivant. Peinture du vivant justement, l’œuvre de Khadija Elfahli est un chant humain, un hymne à la simplicité, à ce qui nous élève, à ce qui nous rend uniques. A ce qui est le miracle de la vie. Un miracle qui va au-delà de la peinture pour s’inscrire dans des signifiances humaines profondes, comme on peut le lire chez Henri Matisse: “Il faut que la peinture serve à autre chose qu’à la peinture”. Il faut qu’elle aille au-delà du sens pour donner aux sens la parole. Cette parole cachée que seul le coeur entend.

 


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