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Mascarade

« C’est ainsi, que périra le monde : dans la joie générale des gens spirituels qui croiront à une farce. »

Soren Kierkegaard

Nous y sommes de plein fouet aujourd’hui. Nous y avons plongé pieds et mains liés. Nous sommes arrivés à ce stade où tout ce qui fait nos vies prend des allures pour le moins absurdes, aberrantes, voire dangereusement étranges. Penser ses peurs, les matérialiser, les nourrir, les contredire, arriver aux compulsions et à la ritualisation pour les faire taire. Sans succès. Prendre un mal de crâne pour une tumeur au cerveau, une fièvre pour une méningite, une tâche pour un cancer, un bilan négatif au VIH pour un faux-négatif, un rhume pour un coronavirus, un éternuement spontané pour une contamination calculée… le virus nous fait vivre dans la peur d’être contaminé ou de contaminer. Nous intégrons face au confinement et aux mesures de protection des rituels compulsifs de lavage. L’eau de javel devient notre meilleure amie. Notre voisin est un porteur sain dangereux et irresponsable. Notre enfant de trois ans se balade un flacon de liquide hydro-alcoolique dans la poche et nous regarde avant de toucher un objet. Nos chaussures restent
à la porte. Nous calculons, nous réfléchissons, nous rêvons, nous nourrissons des cauchemars pour nos rituels de protection, chaque jour plus étayés, chaque jour plus marqués et plus protecteurs.

Nous ne maîtrisons plus rien. C’est une aliénation douce. Une folie mesurée et acceptée. La raison devient folie et la folie devient raison. Les percepts s’estompent car l’écoute de soi est balayée par l’écoute de l’autre à qui je dois rassembler. Mais notre amygdale, entité du cerveau qui intègre les émotions, enregistre et fixe nos peurs et marque la mince frontière entre le normal et le pathologique. Le normal et le pathologique font un. Notre homéostasie interne est fortement liée au stress et les niveaux de stress sont au plafond. Notre adrénaline percute le firmament. Nous sommes les héros du covid 19 et nous mettre en danger ne fait que conforter et nourrir le délire. Par ailleurs, nous maîtrisons l’information entre News et Fake News, entre déclarations politiques, théories complotistes, pamphlets sur la fin du monde sans oublier de bien énumérer les signes du jugement dernier qui tape à nos portes. Les évangélistes et les charlatans au nom du religieux en tout genre s’en donnent à cœur joie se désolant de la piété des uns et des autres sans oublier de se faire verser des sommes par Wafacash pour racheter leurs fidèles pécheurs. Nous fantasmons la psychosphère, ce mélange terrible d’angoisse et de peur ambiantes et d’invincibilité incommensurable. La discordance. L’ambivalence. Le déni. Le clivage. Les conduites à risque. La compulsion. La ritualisation… Autant d’éléments sémiologiques probants qu’on retrouve dans les manuels de pathologie mentale. On se leurre. On refuse. On maîtrise. L’acceptation n’est pas au rendez-vous. Le travail sur soi et l’insight encore moins.

On avance toute une panoplie de raisons, à commencer par l’impact économique du confinement, les fragilités personnelles, les antécédents organiques en tous genres et leurs conséquences sans oublier les addictions en tout genre. Il est vrai que devant la peur de mourir, la peur de devenir fou s’estompe et peut être reléguée au second plan. Mais la folie a envahi les rues depuis la levée du confinement. La folie court dans les rues. L’homme court la faucheuse armé d’un masque qu’il ne porte plus. La distanciation est obsolète et les bains de foule rassemblent des sectes d’un ordre nouveau. Après la secte du soleil, la secte de la farce Covid-19. Puis la crise économique. La crise financière. le retour de la guerre en Europe. Le spectre nucléaire. Pendant ce temps, l’homme court à sa perte sans gourou.

 


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