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BEST OF 2017: Les “services rendus” ne constituent plus le seul critère


M ohammed VI est un chef d’Etat qui tient parole: il avait appelé à un séisme politique en ouvrant le 13 octobre dernier la deuxième année législative.

C’est exactement ce qu’il a provoqué ce mardi 24 octobre 2017 en recevant au palais royal de Rabat Driss Jettou premier président de la cour des comptes. Il y avait de la gravité dans l’air: on allait voir ce qu’on allait voir. Les supputations allaient bon train et les conjoncturistes s’amusaient à avancer divers scénarios à propos des résultats du rapport de la cour des comptes relatif au programme « Al Hoceima Manarat Al Moutawassit: sévira ou sévira pas? Sévèrement ou à doses homéopathiques?

Ce 24 octobre, Driss Jettou, dont l’intégrité morale est proverbiale, rendait sa copie au Souverain au terme d’une enquête patiemment menée. A l’audience qui a duré une quinzaine de minutes, sont également présents le chef de gouvernement, Saâd Eddine El Othmani avec le ministre de l’intérieur M. Laftit et celui de l’Economie et des finances, Mohamed Boussaid, auteurs d’un premier rapport/enquête sur la non exécution du programme de développement d’Al Hoceima.

Les conclusions du premier président de la cour des comptes ne prêtent à aucune confusion. Personne n’est accusée de malversations ou détournements des deniers publics. Driss Jettou et ses juges le répètent sans ambages ni circonlocutions: il s’agit de dysfonctionnements enregistrés sous l’ancien gouvernement aux destinées duquel présidait Abdelilah Benkirane qui ont eu raison de « Al Hoceima Manarat Al Moutawassit ». Et par conséquent ont conduit au mécontentement social dit “Hirak”.

Cinq projets sur 644

L’enquête de la cour des comptes, qu’il est difficile de contredire au vu des arguments mis en évidence, décline des faits sans appel. Exemple, sur les 644 projets annoncés devant le chef de l’Etat dans le cadre d’« Al Hoceima Manarat Al Moutawassit », seuls cinq avaient été réellement lancés au moment où commencèrent les marches protestataires du Rif. Autre élément accablant et signe d’une gouvernance approximative, il a fallu s’inscrire dans le temps lent (16 mois) après le lancement officiel du projet de développement d’Al Hoceima pour qu’une commission interministérielle dédiée se réunisse.

Driss Jettou et ses limiers ont interrogé, collecté des explications, compilé des justifications et croisé des documents et des réponses. La moisson fut par la suite soumise à la nécessaire séparation de l’ivraie de la bonne graine. Les responsabilités sont clairement établies et les sanctions annoncées relèvent de la reddition des comptes, principe consacré par la Constitution.

Loin des méthodes expeditifs où les seuls lampistes qui trinquent, les responsables sont, cette fois, tout en haut de la hiérarchie pointés et sanctionnés. Les décisions du souverain tombent immédiatement.

Ce sont quatre ministres en activité qui sont immédiatement limogés par le roi (Mohamed Hassad en sa qualité de ministre de l’intérieur dans le gouvernement Benkirane, Mohamed Nabil Benabdallah, Houcine El Ouardi, respectivement ministres de l’habitat et de la santé et Larbi Bencheikh, à l’époque des faits directeur général de l’OFPPT) alors que la responsabilité de 5 anciens ministres est également établie. Ali Fassi Fihri, directeur général de l’office national de l’eau et de l’électricité n’échappe pas à la sanction. Il est lui aussi révoqué. D’anciens ministres de l’Exécutif Benkirane ne sont pas non plus épargnés. Hakima el Haite, Lahcen Haddad, Lahcen Sekkouri, Rachid Belmokhtar et Amine Sbihi sont mis en cause. La sanction tombe comme un couperet : aucune fonction ou mission officielle ne leur sera plus jamais accordée. 14 hauts responsables de différentes administrations, dont l’identité n’a pas encore été dévoilée, seront sanctionnés en fonction de la gravité des faits retenus contre eux.

Dans ce listing, c’est certainement le départ du très loyal et compétent Ali Fassi Fihri, Directeur général de l’Office national d’eau et d’électricité, qui ne manquera pas de susciter des interrogations dans les cercles de la bienpensance. Le bilan de ce manager hors pair, à l’expertise reconnue dans le continent et à l’international, est perceptible dans le programme de raccordement du monde rural à l’eau potable que dans celui, stratégique, de la fusion des offices de l’eau (ONEP) et d’électricité (ONE) pour donner l’ONEE, et ses mérites laissaient présager une trajectoire toute autre.

C’est toujours le politique qui l’emporte en dernière analyse, les événements d’Al Hoceima sont passés par là. L’autorité suprême a préféré prendre en compte les attentes des populations concernées en s’appuyant sur un rapport, somme toute accablant, plutôt qu’invoquer le motif «services rendus » qui aurait suffi pour le maintien de certains hauts fonctionnaires. Se faisant, le Roi Mohammed VI fait monter le royaume d’un cran dans l’ère de la reddition des comptes. Du reste, le premier ministre devra, en ce qui le concerne, réajuster son équipe ministérielle pour faire face aux urgences.


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