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Les éditeurs de journaux rejettent un projet de loi controversé : La FMEJ dit NON !

Scandale et Monopole : La FMEJ dénonce des textes de loi "sur mesure" pour le secteur.

Par Mohammed Taoufiq Bennani


La Fédération Marocaine des Éditeurs de Journaux (FMEJ) a sonné l’alarme, le 4 juillet, marquant un tournant décisif pour l’avenir de la presse. Ainsi, son Bureau Exécutif, réuni ce vendredi, a catégoriquement rejeté deux projets de loi fraîchement validés par le gouvernement. En effet, ces textes législatifs, qui visent à réorganiser le Conseil National de la Presse et à modifier le statut des journalistes professionnels, sont au cœur d’un débat houleux, agitant le corps professionnel, mais aussi les sphères politiques, des droits de l’homme et la société civile dans son ensemble.

Un dialogue ignoré

L’exécutif de la FMEJ a de nouveau constaté que le ministère de la Communication et, par ailleurs, le gouvernement, ont foulé aux pieds l’approche participative traditionnellement respectée. En effet, cette initiative législative majeure a été lancée sans la moindre consultation préalable avec la Fédération, une organisation professionnelle historique et reconnue. Pourtant, les gouvernements précédents avaient toujours privilégié cette concertation, une démarche essentielle pour des réformes d’une telle envergure.

Des dispositions controversées

Le projet de loi approuvé par le Conseil du gouvernement instaure un système d’« investiture » pour les éditeurs, contrastant fortement avec l’« élection » pour les journalistes. Cette distinction à elle seule suffit à rendre le texte « professionnellement, légalement et constitutionnellement désastreux », selon la FMEJ. D’une part, elle enracine une discrimination manifeste entre les professionnels dans leur mode de sélection. D’autre part, elle éloigne l’organe de toute possibilité d’être une institution d’autorégulation, contredisant directement l’Article 28 de la Constitution marocaine qui prône la démocratie et l’indépendance de sa formation, l’élection étant la plus haute expression de ces principes. De ce fait, la FMEJ estime que cette « innovation » gouvernementale, si elle est adoptée, privera l’institution de toute « légitimité et crédibilité » auprès des professionnels et du grand public.

Le spectre du monopole

Ce que la FMEJ qualifie de « scandale », c’est le dépassement du principe « une entreprise, une voix ». Ainsi, une seule entreprise pourrait disposer de « vingt voix », un poids déterminé par sa taille et son chiffre d’affaires. Ces voix ne sont pas utilisées pour des élections, mais sont comptabilisées comme un poids pour la représentativité, permettant de désigner l’organisation professionnelle la plus représentative. C’est pourquoi cette organisation, par la suite, nommera les sept membres représentant les éditeurs. Par conséquent, la FMEJ affirme que cette loi est « taillée sur mesure pour les entreprises à fort capital ». Non seulement elle consacrera l’accaparement, la domination et le gigantisme, mais encore elle éliminera la pluralité et la diversité du secteur. Selon la Fédération, cela contredit les principes démocratiques mondiaux, car le capital, le chiffre d’affaires et les revenus publicitaires ne devraient pas être des critères de représentation dans une institution d’autorégulation, dont l’une des principales missions est l’éthique professionnelle.

Autres irrégularités signalées

Le Bureau Exécutif a relevé « de nombreuses irrégularités » supplémentaires dans ce texte de loi. Notamment, les élections ouvertes aux journalistes ne spécifient pas les catégories (presse écrite, audiovisuelle, agence), ce qui menace l’équilibre de la représentativité. De plus, la présidence de la commission des entreprises reste aux éditeurs, tandis que celle de la commission des cartes est retirée aux journalistes. Il est vrai que les membres du comité de supervision des élections, présidé par un juge, incluent des éditeurs et des journalistes qui ont été nommés par le Chef du gouvernement et une seule organisation professionnelle. En outre, une nouvelle sanction a été ajoutée aux compétences du Conseil : la « suspension des journaux ». Enfin, le projet vise à rendre l’arbitrage dans les conflits du travail obligatoire, alors qu’il est traditionnellement consensuel, et annule le principe de la rotation de la présidence du Conseil entre journalistes et éditeurs, ainsi que la limitation de la présidence à un seul mandat, pourtant porté de quatre à cinq ans.

En conclusion, la Fédération Marocaine des Éditeurs de Journaux insiste que l’action gouvernementale récente représente un « acte législatif régressif qui a porté un coup dur à notre pays et à son capital démocratique et des droits de l’homme ». La loi en question, de ce fait, est en « contradiction avec l’Article 28 de la Constitution » et « enterre tout sens à l’institution d’autorégulation des journalistes », exposant la profession à « une alliance d’intérêts commerciaux, rentiers et hégémoniques ». La FMEJ exhorte les membres du Parlement, toutes chambres confondues, à « se hisser au-dessus de la logique partisane étroite ». Par ailleurs, elle les appelle à prendre la mesure du « préjudice contenu dans les deux textes » et à œuvrer pour « corriger leurs lacunes ». Les éditeurs marocains, conscients de leur histoire et de leurs positions, affirment leur détermination à poursuivre leur combat. Ils appellent toutes les entreprises de presse, les syndicats de journalistes crédibles, les professionnels, les organisations de défense des droits humains et les forces démocratiques nationales à « se ranger du côté de la profession et des fondements de l’État de droit », afin de s’opposer à cette régression qui « joue avec une profession qui est le poumon de la démocratie ». Ce bras de fer marquera-t-il un recul décisif pour la liberté de la presse au Maroc, ou le Parlement saura-t-il défendre son intégrité et sa liberté ?


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