Les délinquants, une bombe à retardement
Par Yassine Andaloussi
Au Maroc, derrière les manifestations et revendications citoyennes, un phénomène inquiétant reste largement ignoré. La concentration de jeunes délinquants inconscients dans certains quartiers crée un antagonisme latent et favorise le développement d’une économie parallèle informelle.
Le Maroc connaît une urbanisation rapide mais souvent mal encadrée sur le plan social et culturel. Certaines zones périphériques regroupent un grand nombre de jeunes marginalisés et deviennent des points chauds où la délinquance prospère. La responsabilité des parents, souvent invoquée, ne suffit pas à expliquer le phénomène. Ces jeunes sont nourris par une culture subversive et par le sentiment d’exclusion sociale. La concentration géographique de ces jeunes dans des quartiers spécifiques renforce leur identité collective tout en alimentant l’antagonisme envers les habitants des centres urbains. Les points chauds se transforment en micro-sociétés où les règles officielles sont remplacées par des codes de survie propres au groupe. L’exemple des cités françaises des années 1990 et 2000 montre comment la marginalisation peut créer des enclaves de délinquance. Le Maroc observe aujourd’hui des dynamiques similaires dans certaines banlieues de Casablanca, Rabat, Tanger ou Agadir.
La forte concentration de jeunes dans un même espace augmente la pression sociale interne et incite à reproduire les comportements antisociaux pour ne pas être rejeté au sein du groupe. L’isolement spatial devient un moteur d’exclusion sociale et favorise l’émergence de comportements déviants ainsi qu’une culture de la confrontation.
Une jeunesse inconsciente et subversive
Le problème dépasse la simple criminalité et touche une jeunesse souvent inconsciente des conséquences de ses actes. Ces jeunes se retrouvent en rupture avec les institutions éducatives et professionnelles et manquent de perspectives d’avenir. L’errance dans l’espace public et les rassemblements parfois violents lors des manifestations sont les symptômes d’un malaise profond. Cette inconscience est renforcée par l’exposition à des modèles de comportements subversifs. Les réseaux sociaux jouent un rôle central en glorifiant certaines formes de violence et en normalisant la délinquance. Dans ce contexte, même les parents les plus attentifs peinent à encadrer leurs enfants. Le manque de civisme observé lors des manifestations traduit un problème structurel et culturel qui place la jeunesse marginalisée en marge de toute structure sociale et éducative.
Cette situation est aggravée par le sentiment d’un monde injuste ou hostile. Les jeunes issus de points chauds développent un sentiment de rejet et d’injustice qui alimente leur agressivité et leur désir de confrontation. Sans dispositifs éducatifs ou sociaux adaptés, cette frustration se traduit par une propension accrue à la violence et à la délinquance, mettant en péril la stabilité sociale.
Points chauds deviennent terrains économie parallèle
La concentration de jeunes dans certains quartiers favorise l’émergence d’une économie parallèle. Trafic de stupéfiants, vente illégale et contrebande se développent dans ces zones. Cette économie informelle offre aux jeunes délinquants une autonomie financière et renforce leur sentiment d’appartenance au groupe tout en valorisant leur rôle au sein de la communauté.
Le danger est double. D’une part, ces activités illégales entretiennent la marginalisation et d’autre part elles renforcent l’antagonisme envers les populations des métropoles. Les points chauds deviennent à la fois des espaces de délinquance et des foyers de contestation sociale. L’exemple des cités françaises montre que la marginalisation spatiale et sociale peut créer des enclaves de violence et de criminalité, avec des conséquences durables sur la cohésion sociale et sur l’économie locale.
Au Maroc, ce phénomène est encore en phase émergente mais les signaux d’alerte sont déjà visibles. Les jeunes regroupés dans ces quartiers reproduisent des comportements similaires à ceux observés à l’international, où la marginalisation devient un catalyseur de violence, de criminalité et d’exclusion.
Approche préventive et dissuasive urgente
Face à cette situation, il devient urgent de mettre en place des stratégies préventives et dissuasives adaptées. Ignorer la concentration de jeunes délinquants reviendrait à laisser se constituer une bombe sociale prête à exploser. Les mesures doivent combiner actions éducatives, sociales et sécuritaires.
Sur le plan éducatif, il faut créer des programmes de réinsertion qui offrent des perspectives d’avenir. L’accès à l’enseignement, à la formation professionnelle et aux activités culturelles et sportives peut jouer un rôle déterminant dans la prévention de la délinquance. L’objectif est de rompre le cercle vicieux qui lie marginalisation, frustration et criminalité.
Sur le plan social, il est nécessaire de renforcer la cohésion entre les quartiers périphériques et les centres urbains. Les politiques d’aménagement urbain doivent intégrer la dimension sociale et prévenir la ségrégation spatiale. La création d’espaces de rencontre, de dialogue et de participation citoyenne permet de réduire le sentiment d’exclusion et d’antagonisme.
Sur le plan sécuritaire, une action ciblée sur les points chauds est indispensable. Il ne s’agit pas de répression massive mais de mesures proportionnées et intelligentes pour dissuader les comportements criminels tout en favorisant l’insertion sociale. La combinaison de prévention, d’éducation et de contrôle ciblé reste la clé pour limiter les dégâts et éviter la propagation d’une culture de délinquance.
Désamorcer bombe sociale
Le Maroc est à un tournant critique. La concentration de jeunes délinquants dans des points chauds, nourrie par l’inconscience et la marginalisation, représente une bombe sociale à retardement. L’expérience des cités françaises montre que l’inaction face à la marginalisation urbaine conduit à la création de zones autonomes de délinquance et de tension sociale.
Pour prévenir cette trajectoire, il est urgent d’adopter une approche globale combinant prévention éducative, réinsertion sociale et actions ciblées sur les points chauds. La jeunesse, même marginalisée, peut redevenir un moteur de cohésion sociale si elle est accompagnée par des politiques responsables et intelligentes. Ignorer le problème ne ferait que renforcer les dynamiques de violence et d’exclusion, menaçant l’avenir du tissu social marocain.
Le défi consiste à transformer ces points chauds en espaces d’opportunités et à canaliser l’énergie de la jeunesse vers des actions constructives et citoyennes. Chaque jour d’inaction augmente le risque que cette bombe sociale explose avec des conséquences difficiles à maîtriser.
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