Les camps de Tindouf : un foyer de recrutement djihadiste
Un carrefour de l'extrémisme

Par Yassine Andaloussi
Les camps de Tindouf, situés dans le sud-ouest de l’Algérie, abritent depuis des décennies des milliers de réfugiés sahraouis. Longtemps présentés comme un symbole de la lutte pour l’autodétermination du Sahara, ces camps sont aujourd’hui au cœur d’un inquiétant glissement vers l’extrémisme violent. Un récent rapport du groupe de réflexion américain Foundation For Defense of Democracies tire la sonnette d’alarme, ces territoires seraient devenus un vivier de recrutement pour les groupes djihadistes opérant dans la région du Sahel, ainsi qu’un carrefour pour les réseaux extrémistes transnationaux.
Un terrain fertile pour le radicalisme
Les conditions de vie précaires dans les camps de Tindouf, marquées par une économie de survie, un chômage endémique et un accès limité à l’éducation, créent un environnement propice à la radicalisation. Les jeunes, désœuvrés et sans perspectives, constituent une cible privilégiée pour les recruteurs djihadistes. Selon le rapport, des groupes comme Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI) ou l’État islamique dans le Grand Sahara (EIGS) exploitent cette vulnérabilité. Ils offrent non seulement une source de revenus, mais aussi un sentiment d’appartenance et une idéologie mobilisatrice. Les camps, en raison de leur isolement géographique et de leur faible contrôle sécuritaire, serviraient de zones de transit et de planification pour les attaques dans le Sahel.
Des liens troubles avec les réseaux criminels
Au-delà du recrutement, les camps de Tindouf seraient intégrés dans des circuits criminels transsahariens, notamment le trafic d’armes, de drogue et la contrebande. Ces activités illicites, qui financent les groupes terroristes, bénéficient de la complicité de certains acteurs locaux et régionaux. Le rapport souligne également la porosité des frontières entre l’Algérie, le Mali et la Mauritanie, facilitant les mouvements des combattants. Les djihadistes utiliseraient les camps comme des bases arrière, profitant de l’instabilité chronique de la région pour consolider leur emprise.
L’échec des politiques de gestion des réfugiés
La situation alarmante des camps de Tindouf met en lumière l’échec des mécanismes internationaux de gestion des réfugiés. Le statu quo politique autour du conflit du Sahara occidental, gelé depuis des décennies, a contribué à la marginalisation des populations sahraouies. L’absence de solutions durables, qu’elles soient politiques ou humanitaires, a ouvert la voie à l’exploitation par les groupes extrémistes. Le HCR et les ONG présentes sur le terrain peinent à assurer une surveillance efficace, tandis que les autorités algériennes, qui administrent de facto ces camps, sont accusées de laxisme, voire de complicité passive.
Une menace pour la stabilité régionale
La transformation des camps de Tindouf en plaque tournante du terrorisme représente une menace directe pour la sécurité de toute la région. Les attaques djihadistes au Mali, au Burkina Faso et au Niger pourraient être en partie planifiées depuis ces zones. Les pays voisins, ainsi que les puissances internationales engagées dans la lutte contre le terrorisme (États-Unis, France, Union européenne), sont appelés à revoir leur approche. Le rapport préconise une meilleure coordination entre les services de renseignement et une pression accrue sur l’Algérie pour qu’elle assume ses responsabilités sécuritaires.
Urgence d’une action concertée
La situation des camps de Tindouf ne peut plus être ignorée. Si des mesures urgentes ne sont pas prises pour améliorer les conditions de vie des réfugiés et combattre l’infiltration djihadiste, la région risque de sombrer dans une spirale de violence encore plus profonde. La communauté internationale doit agir avant que ces camps ne deviennent un nouveau sanctuaire terroriste, capable de déstabiliser l’ensemble du Maghreb et du Sahel.