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Le gouvernement et la question sociale

Par Sanae El Amrani


L’équation sociale au Maroc pose de sérieux problèmes. C’est un fait établi, aujourd’hui, la vie est de plus en plus très chère au Maroc. Tous les prix ont flambé. Les légumes, les fruits, les denrées alimentaires de base, les produits laitiers, les produits de première nécessité, le poulet, la sardine (ce que le pauvre peut s’offrir quand il peut), l’essence, le gasoil, les transports, les livres scolaires, le bétail, les fringues, les jouets, les services, les unités de soins, les hôpitaux, les écoles, les cafés, les snacks, les restaurants, les hôtels, les piscines, les clubs… Là où le citoyen passe, il se rend compte que le Marocain, qui n’a pas de moyens, est exclu d’une grande partie de ce qui fait la vie à la Marocaine. Autrement dit, le pauvre, déjà dans la précarité, doit encore serrer la ceinture jusqu’à l’asphyxie. C’est cela la triste réalité de millions de familles marocaines qui vivent dans le besoin, qui colmatent les brèches et qui bricolent dans l’incurable. C’est cela la stricte vérité que beaucoup de Marocains veulent ignorer détournant le regard et faisant semblant que tout va bien dans le meilleur des mondes. C’est faux et archi faux. Alors, face à la vie chère, quels sont les leviers que doit activer le gouvernement ?
Dans ce sens, les propos du président de la Fédération nationale des associations du consommateur (Fnac) donnent le ton : «La situation est catastrophique, non seulement pour le Maroc, mais partout dans le monde. La reprise progressive de l’économie a induit une inflation qui s’est répercutée sur les prix des produits de grande consommation comme l’huile de table, qui a connu des augmentations record. Le coût du fret international a explosé et les cours des matières premières sont montés en flèche. Face à des revenus en baisse à cause des répercussions de la crise du Covid-19, le panier de la ménagère devient de plus en plus cher». De fait, les choses sont claires : à titre d’exemple, le prix de la bouteille d’huile de table de 5 litres, est passé de 50 ou 60 dirhams à plus de 128 dirhams. C’est le cas aussi des prix des pains et des céréales (11,5%), des légumes (4,5%) et des viandes (4,1%). Selon le Haut Commissariat au Plan, la hausse des produits alimentaires observée entre mai et juin 2022 concerne principalement les «Huiles et graisses», dont le prix à grimpé de 2,7%, le «Lait, fromage et œufs» de 2,1%, les «Eaux minérales, boissons rafraichissantes, jus de fruits et de légumes» de 0,8% et le «Café, thé et cacao» de 0,4%. En ce qui concerne les produits non alimentaires, la hausse a marqué les prix des «Carburants» avec 9,2%. Toutes ces hausses sont bel et bien actées, mais les salaires, eux, stagnent irrémédiablement. Pourtant, les prix des céréales, des huiles végétales et du sucre ont reculé à l’échelle mondiale fin juin 2022, comme l’a annoncé l’Organisation mondiale des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO).
Alors comment le gouvernement réagit face à cette situation inextricable qui s’est traduite par des campagnes sur les réseaux sociaux dénonçant la cherté de la vie au Maroc allant jusqu’à demander la démission du Chef du gouvernement. Un chef du gouvernement, Aziz Akhannouch, qui a même précisé, il y a quelques semaines, que le gouvernement a déjà alloué des subventions importantes pour réduire l’impact du renchérissement des cours des produits pétroliers et des matières premières à l’international. Ces subventions représentent 17 milliards de dirhams pour le gaz butane, 14 milliards de dirhams pour l’électricité, 600 millions de dirhams par mois pour subventionner la farine de blé et 3 milliards de dirhams par an pour le sucre. En ce qui se réfère à la hausse des prix du carburant, qui ont atteint plus de 17 dirhams, Aziz Akhannouch a promis des mesures pour alléger la situation qui a duré très longtemps, alors que les prix des hydrocarbures à la station ont baissé presque partout dans le monde. Il a même ajouté qu’«Un dialogue est engagé avec les représentants des professionnels du transport afin de trouver des solutions pour alléger l’impact des prix élevés du carburant sur les citoyens».
Mais à ce jour, fin décembre 2023, le prix de l’essence flirte toujours avec les 15 dirhams paralysant les activités de millions de Marocains qui dépendent des hydrocarbures pour faire du commerce et subvenir à leurs besoins. Mais comment s’en sortir quand on a un revenu de 2000 ou 3000 dirhams ? Comment faire, quand on est simple vendeur ambulant ? Comment faire quand on est ouvrier dans une usine, comme le sont des millions de Marocains ? Comment faire quand on est veuve, quand on est vieux, quand on n’a personne pour subvenir à nos besoins ? Comment s’en sortent les retraités au Maroc ? Comment faire quand on est instituteur avec un salaire qui varie entre 3000 et 5000 dirhams, selon l’échelle ? À combien on peut louer un petit appartement avec le strict minimum, comment se nourrir, comment se soigner, comment payer l’eau et l’électricité, qui sont aussi très chers au Maroc, comment payer les frais de scolarité des enfants ? Comment fait-on quand on est facteur, caissier, agent de sécurité, vendeur ou agent dans un call center, l’un des domaines qui embauche de plus en plus au Maroc ? L’équation est simple, pour un grand nombre de Marocains, la question qui préoccupe et empêche de dormir est la suivante : comment finir le mois, comment payer les dettes et les crédits, comment survivre ? Parce que pour une majorité, la question est justement de survivre à défaut de vivre dignement.

 

Nouveau modèle de développement : Un chantier de règne

Après le scrutin du 8 septembre 2021 et la nomination d’un nouveau gouvernement le 7 octobre 2021, la majorité des citoyens marocains ont cru avoir lu et tourné la page d’une décennie entachée par le sentiment de l’inachevé et du travail bâclé. Pour les populations marocaines, le mot d’ordre était simple : place à une autre théorie applicable sur le terrain accidenté des réalités de ce pays aux multiples défis. Face à tous ces challenges de taille, quels sont d’abord, les nouveaux défis qui se présentent au Maroc aujourd’hui à la lumière des actions royales anticipatives qui ont donné corps à une commission ad hoc pour apporter des réponses utiles, rigoureuses, fiables et faisables ?
En effet, ce nouveau gouvernement est sommé d’apporter sine mora des réponses ciblées pour l’instauration d’un nouveau modèle de développement, considéré comme un grand chantier de règne. Avec comme points d’orgue un développement industriel tous azimuts, une implantation régionale dans le Maghreb, dans le Monde arabe et en Afrique plus efficiente consolidant les grands acquis déjà engrangés pour jouer pleinement ce rôle de leader qui porte l’ambition marocaine au-delà des frontières géographiques et politiques. «La modernisation des infrastructures, le lancement de nombreuses stratégies sectorielles et l’engagement du Maroc dans un vaste programme d’énergies renouvelables ont permis d’apporter des réponses économiques pertinentes et de préparer l’avenir», lit-on dans les pages du Nouveau modèle de développement.
Ce nouveau gouvernement a aujourd’hui la possibilité couplée à l’opportunité historique de mettre ses visions en pratique tranchant complètement avec les ratés du passé. Pour cela, il doit prendre comme priorités les objectifs suivants : «le doublement du produit intérieur brut par habitant à horizon 2035, une maîtrise des apprentissages de base à la fin du cycle primaire par plus de 90% des élèves, l’augmentation du nombre de médecins par habitants pour atteindre les normes de l’OMS, la réduction à 20% de la part de l’emploi informel, l’élargissement du taux de participation des femmes à 45%, contre 22% en 2019, un taux de satisfaction des citoyens envers l’administration et les services publics de plus de 80%», comme nous pouvons le lire dans la synthèse du Nouveau modèle de développement.
Parmi ces réponses attendues dans l’urgence, une politique de mise en valeur de l’enseignement et de l’éducation nationale en valorisant les instituteurs et les professeurs, en dotant les écoles marocaines des moyens nécessaires pour fournir aux enfants un accès assuré au savoir et aux connaissances. Cela passe par une école nettoyée de la violence, devenue monnaie courante. Cela passe par la lutte contre le trafic et la consommation des drogues dans les écoles marocaines. Cela passe par la valorisation du diplôme comme un outil permettant l’accès au marché du travail, dans une synergie entre ce que proposent les écoles et les universités et ce qu’attendent l’économie et les différentes industries qui y sont rattachées. Dans cette optique, l’école doit être pensée comme un investissement dans le cadre d’une industrie des compétences, avec la garantie du rendement et du retour sur investissement. Cela passe par des compensations, par des salaires attrayants, par redonner à l’école et à l’université marocaines leurs lettres de noblesse en en faisant des centres névralgiques dans la quête des intelligences et des compétences dans tous les secteurs vitaux pour le Maroc.


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