Huile d’olive 2026 : La récolte s’annonce abondante, les prix en repli
LA VÉRITÉ
Deux campagnes difficiles ont propulsé le litre d’huile d’olive jusqu’à 120 DH. La prochaine récolte s’annonce nettement plus généreuse, avec des rendements en hausse et un retour à des volumes proches de 200 000 tonnes. Le marché anticipe un repli du prix vers 70 DH, voire 60 DH le litre, signe d’un cycle plus favorable pour les ménages comme pour les moulins.
Après des années marquées par la sécheresse, les vergers d’oliviers retrouvent de la vigueur. Dans les bassins historiques comme la région de Kelaâ des Sraghna, la floraison a été homogène et précoce, portée par des pluies arrivées au bon moment et par une meilleure gestion des exploitations. Les professionnels évoquent des hausses de rendement par hectare rarement observées ces dernières saisons. Dans plusieurs zones, la perspective d’une récolte supérieure de 40 à 50 % par rapport à l’an dernier revient avec insistance. Le signal est suffisamment net pour que les opérateurs révisent leurs scénarios de prix et réactivent des programmes d’achat auprès des oléiculteurs.
Le redressement repose à la fois sur la météo et sur la dynamique propre à l’olivier. Cette culture alterne naturellement années hautes et années basses. Après une campagne 2024-2025 modeste, estimée autour de 90 000 tonnes d’huile, la suivante s’inscrit dans une phase de rebond. Les plantations entrées en production ces dernières années, conjuguées à des soins culturaux mieux suivis, devraient amplifier l’effet volume. Dans les moulins, on se prépare à des flux supérieurs, en révisant les calendriers de trituration et en sécurisant l’approvisionnement en contenants, filtres et main-d’œuvre saisonnière.
Ce regain de volumes a un corollaire immédiat sur le panier du consommateur. La flambée observée l’an dernier a pesé sur l’inflation alimentaire et comprimé la demande. Si les premières transactions de campagne confirment la tendance, le litre devrait s’échanger nettement en dessous des pics récents. Le retour d’un corridor de 60 à 70 DH offrirait un bol d’air aux ménages tout en redonnant du souffle aux marques organisées, souvent prises en étau entre la hausse des coûts et la sensibilité du pouvoir d’achat. Pour les coopératives, l’enjeu est de capter la valeur grâce à des circuits plus formalisés, à la certification et à la mise en marché d’huiles de cru, segments qui résistent mieux aux à-coups conjoncturels.
La perspective d’une année pleine ne doit pas masquer les risques phytosanitaires. Les conseillers agricoles insistent sur les traitements post-récolte et la surveillance des vergers afin d’éviter la propagation de parasites comme la cochenille noire, fréquemment observés après des campagnes fastes. La santé des arbres conditionne la stabilité des rendements et la qualité de l’huile, en particulier l’acidité et les composés phénoliques, critères de plus en plus décisifs pour la commercialisation locale et à l’export.
Se profile aussi une question de tempo. Si 2026 s’annonce abondante, 2027 pourrait être moins fournie par effet d’alternance. Les opérateurs les plus prudents recommandent de constituer des stocks stratégiques à l’issue de la campagne, en privilégiant des conditions de conservation rigoureuses pour préserver la fraîcheur organoleptique. Des facilités de trésorerie et des capacités de stockage mieux adaptées permettraient d’étaler la mise en marché, d’amortir les chocs de prix et de mieux servir la distribution moderne qui exige des volumes réguliers toute l’année.
Cette conjoncture rebat aussi les cartes sur le plan industriel. Les trituration-conditionnement qui ont investi dans la filtration, la traçabilité et la certification qualité arrivent mieux armés pour transformer l’abondance en parts de marché durables. L’assainissement de la filière, la lutte contre les coupages frauduleux et la montée en gamme des références extra-vierges seront déterminants pour convertir la baisse des prix en regain de confiance. Le moment est propice pour accélérer l’irrigation économe, renforcer l’encadrement technique des petits et moyens oléiculteurs et encourager l’agrégation autour d’unités performantes capables de garantir qualité, volumes et prix justes.
Pour les exportateurs, la fenêtre 2026 peut servir de tremplin. Une offre plus fournie et plus régulière ouvre la voie à la reconquête de clients dans les marchés méditerranéens et d’outre-Atlantique, à condition de tenir le cap sur les normes, les profils sensoriels et les conditionnements demandés. La valorisation par l’origine et par les appellations locales, alliée à une politique commerciale agile, peut créer un différentiel positif au-delà de la simple compétition par les coûts.
Au-delà des chiffres, la filière joue une carte économique et sociale majeure. Des centaines de milliers de familles vivent directement ou indirectement de l’olivier, des récoltants saisonniers aux transporteurs en passant par les ateliers de verrerie et d’emballage. Un atterrissage ordonné des prix, sans à-coups, soutiendra la consommation et sécurisera les revenus sur l’ensemble de la chaîne. C’est dans cet équilibre entre volume, qualité et discipline de marché que 2026 peut marquer le début d’un cycle plus serein.
L’optimisme reste de mise, mais il s’accompagne d’une exigence. Capitaliser sur l’année d’abondance pour préparer la suivante, protéger les vergers, lisser l’offre, consolider la qualité et rétablir la confiance des consommateurs, tel est le véritable agenda. Si ces leviers sont actionnés avec constance, l’huile d’olive peut retrouver des prix accessibles tout en élevant la valeur ajoutée nationale.
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