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FinTech, Agritech, Logistique : Comment la diversification des initiatives fait exploser le potentiel entrepreneurial marocain

Analyse des moteurs de la réussite entrepreneuriale marocaine. Entretien avec Ghyzlane Andaloussi, Enseignante-chercheuse à la Faculté d’Economie et de Gestion, Kénitra.

Propos recueillis par Yassine A.


L’écosystème entrepreneurial marocain affiche une dynamique de croissance visible et soutenue, se positionnant désormais à la 88e place du Global Startup Ecosystem Index 2025. En effet, les autorités publiques et la diversification des initiatives dans des secteurs clés tels que la FinTech et l’Agritech contribuent à cette montée en puissance. Mais au-delà des facteurs contextuels, quelles sont les clés fondamentales du succès entrepreneurial ?

Nous recevons l’auteure d’une thèse doctorale ayant ancré ses réflexions sur la réussite entrepreneuriale pour décrypter ce phénomène. Selon ses recherches, les caractéristiques comportementales, notamment la proactivité, la résilience et la créativité, constituent le véritable moteur du développement et de la pérennité de l’entreprise.

De plus, cet entretien met en lumière le rôle central des jeunes, notamment la Génération Z, qui, portés par une nouvelle culture de l’initiative et une aspiration à l’autonomie et à l’impact, réinventent l’entrepreneuriat. Ils constituent un puissant catalyseur pour un entrepreneuriat local, engagé et inclusif, malgré les défis persistants liés au financement et aux contraintes administratives. Cet entretien offre une feuille de route essentielle pour comprendre les forces vives qui façonneront le développement durable et inclusif du Maroc.

Ghyzlane Andaloussi, Enseignante-chercheuse à la Faculté d’Economie et de Gestion, Kénitra

 

Q – Pouvez-vous nous parler de votre parcours et de ce qui vous a amenée à vous intéresser à l’entrepreneuriat ?

R – Etant moi-même une personne ayant tenté l’expérience entrepreneuriale, j’ai été confrontée à la difficulté de pérenniser mon entreprise. Avec du recul, j’ai compris que l’échec n’était pas seulement lié au choix des produits commercialisés, mais qu’il s’agissait d’un phénomène plus complexe, impliquant des compétences, des comportements et des facteurs contextuels.

Cette remise en question m’a amenée à m’interroger : pourquoi certains entrepreneurs réussissent-ils alors que d’autres échouent ? Quelles sont les compétences qui font la différence ?

Ce questionnement a été le point de départ de mon travail doctoral, que j’ai soutenu à l’Université Ibn Tofail, et qui m’a permis d’ancrer mes réflexions et mes recherches dans le domaine de l’entrepreneuriat et de la réussite entrepreneuriale.

 

– Et d’après les résultats de votre thèse, quelles sont les compétences/qualités essentielles pour réussir dans l’entrepreneuriat ?

– Les résultats de ma thèse ont mis en évidence une prédominance des caractéristiques comportementales dans la réussite entrepreneuriale. Ce sont elles qui constituent le véritable moteur du développement et de la pérennité de l’exercice entrepreneurial.

Parmi les qualités les plus déterminantes, on retrouve : la proactivité, la résilience, la créativité et l’innovation, mais aussi le leadership.

A ces qualités comportementales s’ajoutent des compétences de gestion, indispensables pour traduire une vision en actions concrètes. Mais en définitive, c’est bien l’attitude de l’entrepreneur face à l’incertitude et au changement qui fait la différence entre la réussite et l’abandon.

 

– Comment décririez-vous aujourd’hui l’écosystème entrepreneurial marocain ?

– La dynamique entrepreneuriale au Maroc connaît aujourd’hui une croissance visible et soutenue. Notre pays occupe désormais la 88ème place au Global Startup Ecosystem Index 2025, ce qui traduit la montée en puissance de son écosystème.

Les autorités publiques jouent un rôle moteur à travers la signature des conventions-cadres et la mise en place de dispositifs d’accompagnement destinés à structurer davantage le tissu entrepreneurial, faciliter le financement et favoriser l’émergence des start-ups.

Parallèlement, on observe une diversification des initiatives dans des secteurs à fort potentiel tels que la FinTech, la logistique, l’agritech ou encore l’entrepreneuriat solidaire, qui témoigne d’une volonté d’innover tout en intégrant les enjeux sociaux et environnementaux.

– Selon vous, quelle place occupent les jeunes dans la dynamique entrepreneuriale actuelle au Maroc ?

– Les jeunes jouent un rôle central dans la dynamique entrepreneurial marocaine actuelle. Ils représentent à la fois une force d’innovation et un levier de transformation économique et sociale. Dans l’enquête nationale du ministère des Finances/BAD (2023), environ 40% des entrepreneurs établis ont moins de 35 ans. 

Portés par une nouvelle culture de l’initiative, les jeunes entrepreneurs marocains se distinguent par leur créativité, leur maîtrise du digital et leur volonté de contribuer au changement. Ils investissent dans des secteurs émergents apportant des solutions nouvelles aux défis du pays.

Toutefois, leur potentiel reste parfois freiné par des difficultés d’accès au financement, un manque d’expérience entrepreneuriale et des contraintes administratives. D’où l’importance de renforcer l’écosystème de soutien : formation, financement, accompagnement, et surtout un environnement qui valorise la prise d’initiative et le droit à l’erreur.

 

– Selon vous, dans quelle mesure les manifestations de la Génération Z traduisent-elles un appel entrepreneurial ou une volonté de changement par la création ?

– Les comportements et aspirations de la Gen Z 212 traduisent indéniablement une volonté de changement et, dans une certaine mesure, un appel entrepreneurial.

Cette génération, née dans un contexte marqué par la digitalisation, la crise de sens et les mutations rapides du travail, recherche avant tout l’autonomie, la flexibilité et la possibilité d’avoir un impact concret. Ces valeurs se rapprochent étroitement du mindset entrepreneurial.

Pour beaucoup de jeunes, entreprendre n’est plus seulement un moyen de créer une entreprise, mais une forme d’expression personnelle et un levier d’action sociale ou environnementale. On le voit à travers l’essor de projets à impact, de micro-entreprises digitales ou d’initiatives dans l’économie solidaire.

En ce sens, la Génération Z ne rejette pas le salariat, mais elle aspire à le réinventer à travers des formes d’engagement plus souples, plus créatives, et souvent plus alignées avec ses valeurs et aspirations.

 

– Pensez-vous que ces mouvements peuvent devenir un catalyseur pour un entrepreneuriat local engagé et inclusif ?

– Absolument. Ces mouvements portés par la Génération Z et par une jeunesse en quête de sens peuvent devenir un véritable catalyseur pour un entrepreneuriat local, engagé et inclusif.

D’une part, on observe une réappropriation des enjeux locaux : les jeunes cherchent à répondre à des problématiques de leur territoire, qu’il s’agisse de durabilité, d’économie circulaire, ou d’inclusion sociale.

D’autre part, les valeurs dominantes, comme l’engagement, la solidarité, l’impact social et environnemental, s’alignent avec les nouveaux paradigmes entrepreneuriaux, tels que l’entrepreneuriat à impact ou l’innovation sociale.

Si cet élan est soutenu par des politiques publiques adaptées par un accès facilité au financement et à l’accompagnement, il peut contribuer à ancrer durablement une culture entrepreneuriale inclusive, au service du développement territorial.

 

– Si vous pouviez transmettre un seul message à la prochaine génération d’entrepreneurs marocains, lequel serait-ce ?

Je leur dirais de croire profondément en leurs capacités et en le potentiel de leur pays, même lorsque le contexte semble incertain.

Entreprendre, ce n’est pas seulement créer une entreprise, c’est avant tout créer de la valeur pour soi, pour les autres et pour son pays. 

L’essentiel  ne réside pas uniquement dans la réussite économique, mais dans la faculté d’apprendre, de s’adapter et de produire un impact positif.

Le Maroc a aujourd’hui besoin d’entrepreneurs capables d’allier innovation, responsabilité et ancrage local, pour construire un modèle de développement durable et inclusif.


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