En Afrique, la résilience à la sécheresse et la lutte contre la désertification sont possibles
LA VÉRITÉ
Le renforcement de la résilience à la sécheresse, la restauration des terres et la lutte contre la désertification demeurent possibles en Afrique, bien que ces phénomènes causent davantage de ravages dans les pays qui ont moins de résilience et qui sont peu responsables du changement climatique, a souligné, jeudi à Abidjan, la directrice exécutive du Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE), Inger Andersen.
La dégradation des terres, la désertification et la sécheresse sont en effet des problèmes mondiaux qui touchent plus de trois milliards de personnes et concernent également de nombreux pays africains, a indiqué Mme Andersen qui s’exprimait à l’occasion de la dixième session extraordinaire de la Conférence Ministérielle Africaine sur l’Environnement (CMAE).
Et de poursuivre que la restauration des terres constitue un « outil puissant » et leur gestion durable est de nature à améliorer les moyens de subsistance, de renforcer la résilience, d’augmenter le stockage du carbone, de créer des terres plus productives, de rétablir la biodiversité et, plus fondamentalement, de mener à la croissance, au développement, à la paix et à des sociétés durables.
Mme Andersen a, dans ce sens, cité l’exemple de la grande « Muraille Verte » qui ambitionne de restaurer les terres dans tout le Sahel, notant que le PNUE et la communauté internationale soutiennent les efforts déployés dans ce sens.
Tout en rappelant que la Décennie des Nations Unies pour la restauration des écosystèmes soutient les engagements visant à restaurer un milliard d’hectares, dont plus de la moitié en Afrique, elle a indiqué que « la Journée Mondiale de l’Environnement, organisée par l’Arabie Saoudite le 5 juin, a amplifié ces efforts ».
Elle n’a pas manqué de souligner que les nations africaines ont besoin de soutien de la communauté internationale, étant donné que l’Afrique est un Continent de solutions.
Des solutions aux énergies renouvelables sous la forme de vastes ressources solaires, éoliennes et hydrauliques et de minéraux essentiels, et à la sécurité alimentaire, avec des terres fertiles et des communautés agricoles compétentes, a estimé Mme Andersen, notant que l’Afrique a aussi des solutions pour l’innovation, car disposant à la fois de la jeunesse et de l’expérience d’une population désireuse d’appuyer la croissance, la prospérité, les opportunités et le développement.
Tout en s’interrogeant sur ce que peut faire l’Afrique pour mettre en œuvre ces solutions, notamment dans le domaine de la protection et de la restauration des terres, elle a insisté sur la nécessité d’unir les efforts dans le cadre des trois conventions de Rio.
Les conventions de Rio sur le climat, la biodiversité et les terres tiendront bientôt des conférences des parties, a-t-elle fait savoir, notant que la restauration des terres peut donner lieu à des actions et à des ambitions dans le cadre de ces trois accords.
Les pays africains peuvent se rendre à ces COP avec une position forte sur les terres tout en veillant à relier la restauration, la gestion et la productivité des terres aux engagements climatiques et aux stratégies et plans d’action nationaux pour la biodiversité, a-t-elle estimé, notant que l’Afrique, en tant que bloc uni sous la direction de l’Union africaine, peut soutenir les objectifs de restauration des terres avec des plans d’action clairs et un financement à long terme.
Mme Andersen a, en outre, insisté sur la nécessité de tenir compte de la valeur de la nature, rappelant que la Banque Africaine de Développement (BAD) a évalué le capital naturel du Continent à 6,2 billions de dollars en 2018.
Par ailleurs, elle a déploré le fait que ce capital est en train de s’épuiser à cause de l’exploitation forestière et la pêche illégales, d’une agriculture non durable, de la pollution des sols et de l’eau et des impacts climatiques constants.
Elle a relevé qu’il est donc essentiel de passer à des indicateurs économiques qui valorisent la nature et réduisent ces pressions, mettant en avant également l’importance de la transition vers l’énergie propre, laquelle nécessite un approvisionnement fiable en minéraux essentiels.
Tout en rappelant que l’Afrique possède de vastes gisements de ces minéraux et ressources, elle a rappelé que l’héritage colonial de l’exploitation a enfermé de nombreux pays dans des modèles d’extraction et de commerce qui ne donnent pas la pleine valeur de ces minéraux au pays d’origine.
L’Afrique, a-t-elle expliqué, peut briser ces modèles et s’assurer que la valeur ajoutée se fait chez elle. « Il s’agit d’une opportunité évidente pour les pays africains qui possèdent ces minéraux d’utiliser les revenus accrus pour réduire la pauvreté, assurer le développement durable et investir à long terme », a-t-elle dit.
Tout en affirmant que l’intensification de l’exploitation minière est de nature à endommager davantage la nature et à engendrer l’épuisement de ces minéraux, elle a estimé nécessaire pour le Continent d’aborder l’extraction avec une politique claire et de mener la transition d’une économie linéaire de prélèvement-fabrication-déchet vers un modèle circulaire d’utilisation-réutilisation.
Sur un autre registre, elle a plaidé en faveur du renforcement des financements publics et privés, estimant que les pays africains peuvent contribuer à mettre en place un instrument solide pour mettre fin aussi à la pollution plastique, lors du dernier cycle de négociations qui se tiendra à Busan fin 2024.
Mme Andersen a réitéré l’engagement du PNUE à aider les pays africains, par le biais de la CMAE et au-delà, pour atteindre l’ensemble des objectifs escomptés.