Crise de la presse marocaine : La FMEJ plaide pour une stratégie nationale

LA VÉRITÉ
La Fédération Marocaine des Editeurs de Journaux (FMEJ) a tenu, samedi 17 février 2024, à Rabat, la deuxième session de son Conseil national fédéral, en présence des responsables de ses sections régionales et des membres du Conseil de sa présidence. Selon un communiqué de la Fédération, “un large et profond débat” a suivi la présentation par le président de la FMEJ du rapport du bureau exécutif dans lequel il est fait état de la situation des entreprises de presse, écrite et électronique, ainsi que de l’ensemble des problèmes et difficultés que connaît le secteur tout en réitérant les positions exprimées par la fédération à leur égard.
Les membres Conseil, après la présentation également des rapports des structures territoriales et sectorielles, ont abordé, entre autres, les questions liées au renouvellement de la carte professionnelle ainsi que le décret gouvernemental relatif à l’aide publique et les relations avec les pouvoirs publics, particulièrement, le ministère en charge du secteur, en plus des problèmes de l’environnement économique de l’entreprise de presse dans les régions.
A la lumière de ce débat, la FMEF relève :
– La persistance des difficultés économiques liées aux ressources des entreprises de presse, aux dysfonctionnements du marché de la publicité, aux difficultés de recouvrement des dus et à la faiblesse des versements par les annonceurs.
– Concernant la presse écrite, des problèmes dus à la baisse du lectorat en général, de l’absence et de la faible demande sur les journaux, et aussi des dysfonctionnements au niveau du système de distribution.
– Pour ce qui est de la presse électronique, la persistance de problèmes liés à la faiblesse des revenus et aux paradoxes de l’environnement économique en général.
De même, la Fédération souligne “la multiplication de plateformes électroniques non professionnelles, qui trouvent parfois des parties qui les soutiennent et les financent, et qui représentent une concurrence déloyale, en plus de leur ignorance des règles de la profession journalistique et de la déontologie”. Pour la FMEJ, la presse professionnelle est confrontée aujourd’hui à des défis, dont certains sont quasi existentiels et menacent l’existence même des journaux nationaux, ce qui exige “une stratégie nationale globale et précise pour sauver le secteur”. A l’issue d’un large débat, les membres du CNF ont conclu en la nécessité d’un «dialogue national et professionnel, serein et profond, qui place en premier lieu les intérêts supérieurs du pays, et mette fin aux pratiques unilatérales et anarchiques dont le gouvernement, le ministère en charge du secteur, et certaines parties au sein de la profession en portent la responsabilité”, appelant à “faire face à l’absurdité, à la bassesse et à l’entorse aux lois”.
Concernant la tension que vit actuellement le corps professionnel, la Fédération rappelle qu’elle avait présenté des propositions pour dépasser toutes les impasses que connaît la profession aujourd’hui suite aux confusions entachant l’opération du renouvellement de la carte professionnelle par la commission provisoire, nommée par le gouvernement, et à l’ambiguïté liée à l’adoption du nouveau décret relatif à l’aide publique, mais que “le ministère concerné ne s’en est pas soucié, a fait la sourde oreille” et l’a “délibérément exclue”. Et de souligner que “tout le monde a compris aujourd’hui que la FMEJ a eu raison dès le début, qu’elle tenait au respect des lois et qu’elle plaidait et formulait des propositions de bonne foi, honnêtement et par expérience et en connaissance de cause”. A cet égard, la FMEJ souligne qu’aux “côtés d’autres organisations professionnelles et de nombreux sages du monde politique et sociétal de notre pays elle a estimé et continue de considérer que la démarche du gouvernement ayant consisté à nommer une commission provisoire au lieu de préserver l’esprit de l’article 28 de la Constitution et sauvegarder l’indépendance de l’institution d’autorégulation était une erreur flagrante et une atteinte à l’image du Royaume et à son rayonnement en matière de droit et de démocratie”.
Elle réitère, par ailleurs, son attachement au respect de la loi, de l’éthique et de la constitution du pays, appelant “le gouvernement à intervenir pour mettre fin à ce dépassement, sortir la profession de cette impasse et défendre l’image du Maroc et l’aptitude des journalistes et des éditeurs à élire leurs représentants et à constituer leur institution d’autorégulation de manière indépendante et démocratique”. La FMEJ appelle, en outre, le gouvernement à “corriger son erreur et à œuvrer pour accélérer la sortie du provisoire et aller vers l’application de la loi, le respect de la constitution et la fin de la tension au sein de la profession”.
La Fédération souligne également que sa “position de principe et éthique ne permet à personne de l’exclure de tout dialogue ou représentation concernant les questions de la profession et les intérêts des entreprises du secteur, comme l’a fait la commission provisoire à l’occasion de la réunion de la commission élargie de la Carte professionnelle”. La FMEJ estime, par ailleurs, qu’il n’appartient pas à la commission provisoire d’exercer les pouvoirs et attributions d’autres institutions telles que la CNSS ou la Direction des impôts, et que son rôle n’est pas non plus de s’ingérer dans la relation de travail entre le salarié et l’entreprise ou de s’immiscer même dans les formalités et conditions d’existence de l’entreprise ou du média lui-même. Pour la Fédération, légiférer et élaborer des textes de lois, des règlements et des réformes dans tous les secteurs ne peuvent pas se faire aveuglément et sans tenir compte de la réalité objective. Il n’est pas possible d’adopter des lois et de prendre des décisions et imposer leur mise en œuvre immédiate simplement parce qu’on le veut ou on le désire. Pour la FMEJ, “c’est précisément ce que fait aujourd’hui la commission provisoire, et c’est ce qui est considéré comme une violation des procédures juridiques en vigueur dans le pays”. En ce sens, la FMEJ dit tendre la main au Syndicat National de la Presse Marocaine (SNPM) en espérant qu’il entendra son “appel sincère et y interagira positivement”, conformément à “l’esprit du communiqué final de son dernier congrès national, et de surmonter toutes les susceptibilités, qui pourraient être réelles ou imaginaires, et d’accepter d’œuvrer avec nous” à mettre fin aux tensions et à la division qui sévissent aujourd’hui dans le secteur.