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Ces gens qui rêvent petit

Toujours ce rêve qui ne va jamais au-delà du bout de son nez, parce qu’au Maroc, on n’inculque pas aux enfants le goût de la victoire. C’est rare que les parents disent à leurs rejetons qu’ils sont les meilleurs. Au contraire, on les brime. On les critique. On les affable de sobriquets réducteurs. Bref, on leur coupe les ailes. Et après coup, on se demande pourquoi ils n’ont pas pris leur envol.

Faut-il croire qu’il y a des destinées fatales contre lesquelles nous sommes dans l’incapacité de rompre le sort et le sortilège ? Faut-il abdiquer et se dire tant pis face à cette fatalité de se voir petit et de vouloir encore se ratatiner pour éviter d’influer sur le cours de sa vie ? C’est partant de ce type d’interrogation que je me demande que répondre à une telle saillie de la part d’un ami qui a le chic de poser des questions alambiquées et existentielles : « Pourquoi le Marocain a des rêves si petits et si limités ?» D’abord, j’ai eu envie d’ajouter et si misérabilistes ? Mais je me suis retenu pour écouter le développement de mon ami, fin connaisseur des espoirs avortés, lui, qui a voulu devenir quelqu’un mais qui a évolué en quelque chose d’hybride et d’inqualifiable pour un homme de sa stature cognitive. Pour lui, le Marocain lambda tord le coup à son imagination et la contraint à se mouvoir dans un mouchoir de poche n’excédant jamais une limite qu’il s’impose à lui-même rompant ainsi son propre ressort et se condamnant à faire du sur place en tournant en rond.
Il faut dire qu’en y pensant un tant soit peu avec sérieux, on se rend très vite compte que dans toutes les manifestations de la vie, dans l’infini champ des possibles, avec tout ce que la vie offre comme occasions d’aller au-delà de ses propres limites et de se dépasser, le Marocain se contente de rêver petit. Quand il a un talent ou une inclination donnée, il la voit en minuscule. Il veut être sportif, mais il se compare à une petite vedette locale sans envergure. Comme cet homme à qui son fils, prodige ballon au pied, lui dit qu’il peut devenir comme Lionel Messi, à qui le paternel répond sans sourciller ; «mais tu es devenu fou. Compare-toi à Metouali du Raja et laisse tranquille Messi ». Inutile de dire que ce père mérite d’être poursuivi en justice par ce même fiston qui a vu son espoir de devenir, et pourquoi pas, le plus grand footballeur du monde, réduit à une gloire éphémère un dimanche sur deux.
C’est symptomatique du Marocain qui refuse de voir en lui la graine des meilleurs. Par contre, l’étoffe des zéros fleurit sans crier gare. Comme ce type qui a été arrêté le premier jour des essais du Tramway de Casablanca pour avoir cassé la vitre de la machine super neuve. A la question pourquoi un tel jet de pierre ? Le prévenu a claironné, tenez-vous bien, « pour être le premier à avoir cassé la vitre du Tramway ». Quel record­. Quel exploit. Ce qui explique la rareté des individualités marocaines qui figurent dans les annales des grandes découvertes, des grandes réussites qu’elles soient sportives, culturelles, scientifiques, humaines… Toujours ce rêve qui ne va jamais au-delà du bout de son nez, parce qu’au Maroc, on n’inculque pas aux enfants le goût de la victoire. C’est rare que les parents disent a à leurs rejetons qu’ils sont les meilleurs. Au contraire, on les brime. On les critique. On les affable de sobriquets réducteurs.

Bref, on leur coupe les ailes. Et après coup, on se demande pourquoi ils n’ont pas pris leur envol. Oui, le Marocain ne rêve pas de faire mieux que ce que le plus habile humain est capable de réaliser. Il ne pense même pas à découvrir une nouvelle planète. Pas plus qu’il ne peut s’imaginer un jour prix Nobel de quelque chose. Mais il se réduit, à la base, à dépasser plus petit que soi, dans une unique envie de rabattre le caquet à l’autre. Tristes rêves doublés de morbides inclinaisons.


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