Abidjan 2025 : Élection historique et nouvel élan pour libérer le potentiel africain
Fin des Assemblées BAD à Abidjan. Adieu Adesina, bonjour Sidi Ould Tah et un bilan qui a impacté 565M de vies.

Par Mohammed Taoufiq Bennani
Pendant cinq jours, du 26 au 30 mai 2025, Abidjan a vibré au rythme de l’avenir de l’Afrique. La capitale ivoirienne a accueilli les Assemblées annuelles du Groupe de la Banque africaine de développement (BAD), un événement d’autant plus symbolique qu’il célébrait la 60e édition du Conseil des gouverneurs de la BAD et la 51e Assemblée du Fonds africain de développement.
Ces rencontres ont également marqué un tournant historique avec la transition à la tête de l’institution, faisant de cette édition un moment clé pour le développement du continent. « Maximiser le capital africain pour un développement transformateur », tel était le fil conducteur de ces assises. Au cœur des débats, des stratégies innovantes pour exploiter au mieux les ressources du continent (financières, naturelles, humaines…) et en faire les fondations d’une prospérité partagée et durable.
Le cadre des assemblées : participation et enjeux
Ces Assemblées annuelles ont rassemblé une large diversité de participants. Ainsi, plus de 6000 délégués étaient présents à Abidjan. Parmi eux figuraient des chefs d’État et de gouvernement, des ministres des Finances, des gouverneurs de banques centrales, ainsi que des représentants du secteur privé, de la société civile, des universitaires et des groupes de réflexion. Par ailleurs, des partenaires au développement, des leaders d’opinion et des ONG étaient également présents. La Côte d’Ivoire a joué un rôle stratégique en tant que pays hôte. Le président ivoirien, Alassane Ouattara, a présidé la cérémonie d’ouverture officielle. Il a salué la performance de la BAD, la décrivant comme un “partenaire clé” pour le financement de l’économie ivoirienne.
Les discussions se sont déroulées dans un contexte mondial complexe. En effet, le continent fait face à l’endettement croissant, aux défis du changement climatique et aux tensions géopolitiques. De plus, l’instabilité économique et la baisse de l’aide internationale au développement ajoutent à la pression. L’agenda a mis l’accent sur la nécessité de mobiliser les ressources internes de l’Afrique. Les participants ont abordé les défis du financement des économies et la question de l’endettement. Aussi, ils ont exploré les voies vers une croissance plus inclusive. Le rapport Perspectives économiques en Afrique 2025, dévoilé pendant l’événement, a servi de base aux échanges.
Temps forts : leadership et bilan
Tous les regards étaient tournés vers l’élection présidentielle de la BAD, point d’orgue de ces Assemblées. Sans surprise quant à la date, le scrutin s’est bien tenu le 29 mai comme programmé, mais avec une issue marquante : Sidi Ould Tah a été élu nouveau président, dessinant ainsi les contours d’une nouvelle ère pour le Groupe. Ancien ministre mauritanien des Finances, il prendra ses fonctions pour un mandat de cinq ans le 1er septembre 2025. Cinq candidats africains étaient en lice pour succéder à Akinwumi Adesina, dont Samuel Munzele Maimbo, Amadou Hott, Bajabulile Swazi Tshabalala, Sidi Ould Tah et Mahamat Abbas Tolli.
Les Assemblées ont aussi permis de dresser un bilan des dix dernières années sous la direction d’Akinwumi Adesina. Son deuxième mandat s’achève le 31 août prochain. Le président sortant a présenté un bilan satisfaisant de son action. Il a affirmé que diriger la BAD n’était pas un emploi pour lui, mais “une mission”. Le président Alassane Ouattara a salué le “dynamisme et la performance exceptionnelle” de la BAD durant cette période. Le capital de la Banque est passé de 93 milliards de dollars à 318 milliards de dollars, représentant un quasi triplement et demi. Les actions de la BAD ont “accéléré le développement de l’Afrique” et “impacté la vie de 565 millions de personnes”. Par exemple, 128 millions de personnes ont eu accès à des services d’assainissement. En outre, 103 millions d’Africains ont atteint la sécurité alimentaire. En dix ans, la BAD a apporté “102 milliards de dollars en appui à l’Afrique”. Les “High 5”, lancées en 2015, sont restées une référence importante. Ces cinq priorités stratégiques visent à éclairer et alimenter l’Afrique en énergie, la nourrir, l’industrialiser, l’intégrer et améliorer la qualité de vie de ses populations.
Résolutions stratégiques
Un moment notable fut l’annonce par le Nigéria d’une contribution supplémentaire de 500 millions de dollars pour prolonger de 15 ans le Fonds spécial du Nigéria. Ce fonds soutient des projets pour les pays membres à faible revenu. Akinwumi Adesina a salué cette décision comme une “contribution impressionnante”. Les discussions ont également abordé la nécessité de développer les marchés financiers régionaux pour mobiliser l’épargne locale. L’accent a été mis sur la transformation structurelle, s’appuyant sur la valorisation du capital africain. Les échanges ont intégré la transformation numérique, le renforcement institutionnel et la bonne gouvernance. De plus, une volonté affirmée de faire du commerce intra-africain le socle d’une croissance plus autonome a été soulignée, notamment dans le cadre de la ZLECAf.
Moments symboliques et émotion
La cérémonie de clôture, le 30 mai, fut marquée par un adieu émouvant. Akinwumi Adesina a chanté quelques-unes de ses chansons préférées, dont « I can see clearly now » de Johnny Nash et « We are the World » de Bob Geldof. Il a confié que ces Assemblées annuelles étaient ses dernières en tant que président et que cela avait été le “plus grand honneur de [sa] vie de servir l’Afrique”. Puis, la ministre ivoirienne Nialé Kaba a remis le drapeau de la BAD à Ludovic Ngatse, ministre de l’Économie du Congo. Ce geste a annoncé que les prochaines Assemblées annuelles se tiendront à Brazzaville, du 25 au 29 mai 2026. Les discours ont rendu hommage à la gouvernance d’Akinwumi Adesina et ont appelé à une action coordonnée face aux défis.
Perspectives 2025-2026
Le nouveau président, Sidi Ould Tah, prendra les rênes avec l’ambition de renforcer les institutions financières régionales et de multiplier les mécanismes d’investissement intra-africains. Il souhaite inscrire le continent sur une trajectoire de souveraineté économique accrue. En conséquence, l’accent mis sur la valorisation du capital africain et la transition vers des économies plus inclusives et résilientes se poursuivra. Ses priorités incluent la mobilisation de l’épargne locale via le développement des marchés financiers régionaux. Les défis persistants sont nombreux : l’endettement croissant, les tensions géopolitiques, l’instabilité économique et le changement climatique. Le président Ouattara a également souligné la fragilité causée par le terrorisme et les guerres civiles, appelant à des investissements massifs dans les secteurs sociaux.
Les Assemblées annuelles 2025 de la BAD à Abidjan ont marqué un tournant. L’affirmation d’une ambition collective pour l’indépendance financière et l’appel à la valorisation du capital africain ont été au cœur des discussions. La transition à la tête de l’institution s’est déroulée, ouvrant une nouvelle phase. Les discussions ont mis en avant l’importance de l’éducation, de la gouvernance des ressources naturelles, du développement des marchés financiers régionaux et du commerce intra-africain. Le président sortant a fièrement affirmé que l’action de la BAD avait “accéléré le développement de l’Afrique”.
L’Afrique a clairement affirmé sa volonté d’écrire un nouveau chapitre de son histoire économique. La tâche du nouveau président, Sidi Ould Tah, et des États membres sera immense pour traduire cette ambition en actions concrètes. Le ton est donné : l’heure est à l’action audacieuse et coordonnée pour libérer pleinement le potentiel du continent.
Chiffres clés des Assemblées annuelles de la BAD 2025 à Abidjan
- Dates et lieu : Les Assemblées annuelles du Groupe de la BAD se sont tenues sur cinq jours, du 26 au 30 mai 2025, au Sofitel Abidjan Hôtel Ivoire à Abidjan, en Côte d’Ivoire.
- Nature des Assemblées : Elles comprenaient la 60ᵉ Assemblée du Conseil des gouverneurs de la Banque africaine de développement et la 51ᵉ Assemblée du Conseil des gouverneurs du Fonds africain de développement.
- Participation : L’événement a réuni plus de 6000 participants, avec plus de 6000 délégués initialement attendus et plus de 5000 délégués présents selon une autre source. Les gouverneurs représentant les 81 actionnaires de la Banque étaient présents.
- Élection présidentielle : L’élection du nouveau président de la BAD a été un moment central. Cinq candidats africains étaient en lice. L’élection a eu lieu le 29 mai, et Sidi Ould Tah a été élu pour un mandat de cinq ans débutant le 1er septembre 2025.
- Bilan d’Akinwumi Adesina : Le président sortant, Akinwumi Adesina, a fait le bilan de ses dix ans à la tête de l’institution, ayant dirigé la Banque pendant deux mandats (son second mandat de cinq ans s’achève le 31 août prochain).
- Impact et Financier (Bilan) : Le capital de la Banque est passé de 93 milliards de dollars à 318 milliards de dollars, ce qui représente un quasi triplement et demi. Les actions de la BAD ont impacté la vie de 565 millions de personnes en Afrique. Cent vingt-huit millions de personnes ont eu accès à des services d’assainissement, et 103 millions d’Africains ont atteint la sécurité alimentaire grâce à l’action de la Banque. Au cours des dix dernières années, la BAD a apporté 102 milliards de dollars en appui à l’Afrique. L’appui de l’institution à la Côte d’Ivoire a augmenté de 500% en 10 ans.
- Engagement Financier : Le Nigéria a annoncé une contribution supplémentaire de 500 millions de dollars pour prolonger de 15 ans le Fonds spécial du Nigéria.
- Événements parallèles : 60 événements parallèles ont eu lieu en marge du programme officiel.
- Prochaines Assemblées : Les prochaines Assemblées annuelles se tiendront à Brazzaville, du 25 au 29 mai 2026.